PERPIGNAN (LANGUEDOC-ROUSSILLON) [26.08.15] - Perpignan célèbre jeudi le demi-siècle du « voyage triomphal » du peintre Salvador Dali, performance délirante au cours de laquelle le maître surréaliste a sacré la gare de la ville comme étant le « centre du monde » devant des milliers de personnes.
Le 27 août 1965, c'est en tenue de "Grand Amiral", moustache patinée et canne en main, que le peintre catalan a fait oeuvre de "résurrection" dans la petite ville proche de Céret avant de rejoindre Perpignan et de traverser la ville en calèche.
Accompagné de sa femme Gala, qu'il a pour l'occasion à nouveau demandée en mariage, l'artiste provocateur avait un jeune ocelot sur les genoux et des lunettes de mouche sur les yeux, selon des photos d'époque.
Lors de cet épisode, Dali proclama publiquement son amour pour la gare, un modeste bâtiment où il avait éprouvé selon ses écrits une "véritable éjaculation mentale" en septembre 1963, atteignant une "extase cosmogonique" qui lui fit voir "la constitution de l'univers".
S'il ne reste plus grand chose de ce happening exubérant et exhibitionniste dans les rues de cette ville des Pyrénées-Orientales, la mairie et une poignée de "daliniens" entendent célébrer cet anniversaire jeudi avec une série d'évènements.
"La cocotte du centre du monde commence à mijoter" dès les années 1950, raconte Lluis Colet, volubile président de "l'Association des amis du centre du monde", qui détient toujours le record du "discours le plus long du monde" (124 heures) prononcé en gare de Perpignan.
Revenu des États-Unis en 1948, en pleine époque franquiste, Dali partage sa vie avec Gala à Port Lligat près de Cadaquès, en Espagne. Mais c'est par Perpignan qu'il fait transiter ses oeuvres avant de les expédier à travers le monde.
"Il y a le côté matérialiste, car avec ses oeuvres, c'est une fortune qui s'en va à la conquête de l'Europe", estime M. Colet. Il rappelle que le théoricien surréaliste André Breton avait affublé Dali du surnom "Avida dollars".
En 1939, Dali a d'ailleurs été exclu du mouvement surréaliste, Breton lui reprochant notamment son goût de l'argent et son ambiguïté politique.
"Mais il y a aussi le côté mystique de Dali, que l'on découvre dans les années 50", poursuit M. Colet, ainsi que son attachement à ce "morceau de Catalogne" en terre française.
A travers sa méthode de "paranoïa critique", Dali élaborera tout un tissu de symboles à partir de références historiques et scientifiques autour de ce lieu. Il peindra alors un tableau monumental, "La gare de Perpignan" ou "Pop, op, yes-yes, pompier", aujourd'hui exposé au musée Ludwig à Cologne, en Allemagne.
"Le voyage a été réalisé à l'initiative du maire de Céret, Michel Sagéloly, car il voulait faire venir Dali, après Pablo Picasso et Antoni Tapiès" dans sa commune, rappelle Jean Casagran, commissaire de plusieurs expositions de photographies de Dali. M. Tapiès ajoute en souriant que le "monarque" avait été reçu "d'une façon extraordinaire" par les Perpignanais.
Un demi-siècle plus tard, jeudi, aura lieu la "pose du chou sacré" à 16H21. C'est l'heure exacte de l'arrivée du train de Dali.
Un "totem" offert par le musée Dali de Figuères sera ensuite inauguré. Les discours délirants du peintre seront diffusés dans le hall et quelque 150 artistes et techniciens mettront ensuite en branle une parade à travers la ville, dominée par deux deux géants à l'effigie de Dali et de Gala.
Le cortège passera notamment près de la bijouterie Ducommun, qui avait offert une "bague-mouche" à Gala.
Un artiste perpignanais, Xavier Vilamajo, s'est lancé dans la création d'un portrait éphémère de Dali sur le parvis de la gare avec 2.132 bouteilles de vin: il vise, lui aussi, un record mondial.
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50 ans après, la gare de Perpignan redevient pour un temps le « centre du monde » dalinien
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