Ces économistes spécialisés de la construction attendent une clarification de leur statut. Maintenus en nombre restreint, ils pourraient voir leurs missions élargies.
Ils sont quinze à exercer ce métier peu connu et pourtant indispensable aux chantiers des monuments historiques : celui qui consiste à vérifier les devis des travaux et des programmes, à établir les marchés… « Nous sommes les partenaires des architectes en chef pour toute la partie économique et administrative des travaux, explique Philippe Tinchant, président du Groupement des vérificateurs des monuments historiques. Nous vérifions l’adéquation entre le projet architectural et les aspects financiers ; nous contrôlons les factures ; nous aidons, en amont, le maître d’ouvrage à choisir les entreprises lors des appels d’offres… » En d’autres termes, les vérificateurs des monuments historiques (VMH) estiment et contrôlent les coûts, en tant que principaux acteurs du volet économique des travaux sur les monuments historiques dès lors que l’État engage sa participation financière. Les VMH appartiennent en effet à la catégorie des économistes de la construction, métier héritier du « toiseur » devenu « métreur » (qui calcule les quantités de produits nécessaires à la construction à partir des mesures des plans) qui existe dans tout le secteur du bâtiment et des travaux publics pour garantir la maîtrise des coûts d’un chantier.
Cependant, dans le cadre très strict des interventions sur le patrimoine protégé, les VMH ont une spécificité : ils sont recrutés par l’État sur concours – ouvert de manière très irrégulière – tout en exerçant à titre libéral. « Le recrutement s’adresse à des métreurs ou des économistes de la construction, qui justifient d’une longue expérience chez un vérificateur », poursuit Philippe Tinchant. L’intervention sur les monuments historiques implique en effet une spécialisation. « Nous devons, par exemple, rédiger les pièces conformément aux préconisations techniques édictées par le ministère de la Culture. »
Une fois admis au sein de cette petite corporation, les VMH sont rémunérés par l’État sous la forme d’honoraires calculés selon un barème fixe non négociable, qui tourne autour de 1,5 % du montant des travaux. Les VMH sont par ailleurs soumis à un strict règlement déontologique, leur interdisant notamment de travailler pour les entreprises ; ils subissent des astreintes et doivent exercer leur profession dans le cadre d’une compétence territoriale décidée par décret. La plupart d’entre eux interviennent toutefois à titre privé, en plus de leurs missions réglementaires.
Le principe d’organisation de leur profession est donc proche de celui des architectes en chef des Monuments historiques (ACMH), lesquels sont à la fois fonctionnaires et architectes libéraux. Sauf que, dans le cas des VMH, leur statut d’agent public n’a toujours pas été reconnu par l’administration. « Le texte est en cours d’étude au Conseil d’État », commente sobrement Philippe Tinchant. Depuis 2004, cette spécificité française, liée à la complexité du système de protection des monuments historiques, pose des problèmes à l’administration, qui tente de réformer l’organisation de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’œuvre des travaux sur les monuments historiques. En 2006, un rapport de la mission d’audit de modernisation posait clairement la question de l’avenir de cette « profession très particulière » qui ne bénéficie d’aucun décret statutaire (1). Le VMH se trouve en effet dans une situation ambiguë, entre maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre, soit entre le prescripteur – pour lequel il effectue les chiffrages en qualité de rare spécialiste du domaine – et l’exécutant des travaux, dont il contrôle les dépenses. L’administration voudrait donc clarifier leur statut, tout en préservant leur neutralité d’intervenant mandaté par l’État, qui permet aussi d’exercer un contrôle sur les dépenses des ACMH. Plutôt que le transfert de cette compétence financière aux ACMH – prôné par certains pour les responsabiliser davantage –, et donc une disparition pure et simple des VMH par leur non-remplacement, l’administration préconise désormais de « les maintenir en nombre restreint et d’élargir leurs missions à celles, classiques, des économistes de la construction ». Ces professionnels changeraient alors de nom pour devenir des « économistes des monuments historiques ». Aucune décision n’est pour l’heure arrêtée.
(1) Mission d’audit et de modernisation, inspection générale de l’Administration des affaires culturelles, inspection générale de l’Architecture et du Patrimoine, inspection générale des Finances, Rapport sur la modernisation et la rationalisation de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’œuvre sur les monuments historiques, avril 2006.
(*) Légende visuel : le cabinet Girault-Benayoun s'est vu confier la scénographie du Musée de l'Arc de triomphe, 2008, un projet réalisé pour le Centre des monuments nationaux et supervisé par un vériciateur des monuments historiques.
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Vérificateur des monuments historiques
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- Conditions : justifier d’une expérience professionnelle dans des fonctions touchant au métré, à la vérification des travaux du bâtiment, à l’économie de la construction.
- Renseignements : direction de l’Architecture et du Patrimoine, bureau du personnel, tél. 01 40 15 80 00.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°279 du 11 avril 2008, avec le titre suivant : Vérificateur des monuments historiques