Le Musée d’Orsay, ainsi que ses partenaires, est dans l’expectative de l’arrivée à la tête de l’établissement d’une nouvelle personnalité au caractère tranché.
PARIS - Ces quinze dernières années, le Musée d’Orsay aura peu connu la sérénité. Ayant succédé à la direction de l’institution à Henri Loyrette, appelé au Louvre, Serge Lemoine, qui venait du monde universitaire sans être spécialiste du XIXe siècle, a fini son règne isolé dans son bureau, tant étaient ardues ses relations avec les conservateurs. Guy Cogeval, revenu en 2008 de Montréal, fit courir un vent d’air frais. Cet esprit brillant, arrivé premier au concours des conservateurs, ayant à son actif la rétrospective « Vuillard », a raccroché les collections et relancé les expositions, parmi lesquelles « Claude Monet » au Grand Palais, tout en rouvrant la maison à l’impressionnisme et à la peinture d’histoire. Il a su jouer des relations entretenues de longue date avec le collectionneur américain Spencer Hays pour obtenir une donation de 600 œuvres. Symboliquement, ce dernier est décédé au moment où se tournait cette page de presque une décennie d’histoire. Le président a aussi multiplié les expositions dans le monde, au risque d’être parfois critiqué pour leur caractère commercial. Après quatre ans de nette hausse, la fréquentation est revenue au niveau de 2008 (3 millions de visiteurs), les ressources propres diminuant de 6 % en 2016. Mais Orsay n’est pas seul à connaître ces difficultés, qui s’ajoutent aux amputations budgétaires du quinquennat.
Sur le plan interne, ce fut plus difficile. Affichant sa volonté de bousculer les conservatismes, Guy Cogeval a été desservi par un tempérament tour à tour solaire et vindicatif (même si le ministère de la Culture n’a rien trouvé à lui reprocher), certains conservateurs préférant prendre le large. Un accident vasculaire survenu au Japon a entraîné une longue convalescence, qui a conduit le gouvernement à écourter son dernier mandat tout en lui proposant la direction, depuis le 15 mars, d’un Centre d’études des nabis et du symbolisme.
Soutenue par Loyrette
Laurence des Cars, qui a repris les rênes du Musée d’Orsay ce même 15 mars après avoir dirigé prendant trois ans son annexe, l’Orangerie, n’était pas sa candidate. La nouvelle directrice n’a pas souhaité à ce stade s’exprimer sur un établissement où elle était entrée pour son premier poste il y a vingt-trois ans. Autant dire que le musée, qui est fatigué des tensions et souffre du manque de moyens (il suffit de constater le faible nombre de candidats – et aucun venu de l’étranger, à l’exception du directeur des musées royaux de Belgique, vite mis à l’écart), tout comme ses partenaires, attendent les changements avec une certaine appréhension. Certains avaient fait connaître leurs réserves envers une candidate toujours activement soutenue par Henri Loyrette, en se souvenant de son passage à la direction scientifique de l’agence chargée du Louvre-Abou Dhabi. Nommée dès la signature du contrat en 2007, Laurence des Cars a dû la quitter en 2013 alors que les travaux venaient à peine de commencer. Elle n’avait pas envisagé de vivre sur place. L’Agence France-Muséums était devenue la cible des Émiratis qui se plaignaient du manque de dialogue dans la constitution d’une collection disparate, ainsi que des retards dans l’élaboration du projet scientifique et la formation des personnels – même si des facteurs telle la crise financière ont pesé sur l’entreprise. Au ministère, on minimise cependant ce rôle, en considérant qu’elle a « surtout essuyé les plâtres du projet architectural et qu’elle, au moins, a eu le courage d’y aller ». Jean Nouvel appréciera...
L’ironie veut que, au moment où l’ouverture du Louvre-Abou Dhabi soit désormais prochaine, Laurence des Cars est appelée à siéger aux conseils scientifique et administratif de l’agence, sous la présidence de Marc Ladreit de Lacharrière, ami d’Henri Loyrette. Au ministère, on assure néanmoins qu’elle saura prudence garder, Audrey Azoulay lui ayant expressément demandé de renouer le dialogue avec le Louvre, ce qu’elle a bien l’intention de faire.
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Orsay attend Laurence des Cars
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°475 du 17 mars 2017, avec le titre suivant : Orsay attend Laurence des Cars