Le rapport annuel d’Arts Economics confirme la position dominante, mais très instable, de la Chine sur l’ensemble du marché de l’art.
MAASTRICHT - Un an après l’annonce par Artprice que la Chine occupait la première place du marché des ventes aux enchères de beaux-arts, c’est au tour de la société Arts Economics, dans son rapport annuel commandé par TEFAF, de confirmer la primauté de l’Empire du Milieu, cette fois sur tout le marché de l’art (galeries, antiquaires et maisons de ventes). Dopée par une croissance de 64 %, contre 7,4 % pour le marché mondial, la Chine détient en effet en 2011 30 % de ce marché, devant les États-Unis (29 %), la Grande Bretagne (22 %) et la France (6 %). La performance de la Chine est époustouflante : en 2008, elle n’occupait que 9 % du marché. Comment a-t-elle pu ainsi en trois ans multiplier par 3,6 son marché de l’art ? Si l’on met à part la marge d’erreur liée à la méthodologie de l’enquête, l’explication principale tient à l’accroissement exponentiel du nombre d’ultra-riches en Chine (lire le Journal des Arts n° 361). Le marché chinois (comprenant selon Arts Economics, la Chine continentale, Hongkong, Macao et… Taïwan !) est essentiellement alimenté par des acheteurs locaux. C’est l’une de ses faiblesses, mais il y en a beaucoup d’autres. Selon Clare McAndrew, l’auteur du rapport : « Le marché chinois est instable, à commencer par des ventes publiques en surchauffe. C’est d’autant plus inquiétant que le poids des ventes publiques est beaucoup plus important en Chine qu’ailleurs. Le cadre légal s’est certes amélioré, mais subsistent encore de nombreux facteurs négatifs : le problème des faux, l’absence de garanties des maisons de ventes, un manque d’expertise dans de nombreux domaines… ». Clare McAndrew pointe deux autres faiblesses encore plus inquiétantes : le taux d’invendus et les impayés. Le taux d’invendus dans les ventes publiques est monté à 50 % en volume, ce qui est tout à fait anormal dans un contexte de croissance forte. On comprend bien que lorsque la demande explose, tout se vend ; or, là, c’est l’inverse. Le nombre d‘impayés est lui tout aussi élevé. Selon les chiffres de l’association des maisons de ventes chinoises, rapportés par Arts Economics, 40 % des lots vendus au-dessus de 10 millions de yuans (environ 1,2 million d’euros) à l’automne 2010 n’avaient pas été payés en avril 2011. Il se pourrait donc bien que la performance chinoise ne soit qu’une bulle spéculative, et que le marché chinois retombe à des niveaux moins élevés dans les années qui viennent. Beaucoup de collectionneurs chinois ont surpayé leurs achats. De sorte que ces incertitudes sur la solidité du marché chinois jettent une lumière différente sur la réalité du marché de l’art mondial. Si, comme on l’a dit plus haut, celui-ci a augmenté de 7,4 % en 2011, pour atteindre 46 milliards d’euros, il a cependant baissé, (oui, baissé !) selon Arts Economics, de 2 % en Europe et de 6 % aux États-Unis. Il suffirait que la croissance réelle du marché chinois soit un peu moins élevée que celle annoncée par les chiffres, pour que le marché de l’art mondial ait baissé en 2011.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
L’Empire du Milieu s’étend
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°366 du 30 mars 2012, avec le titre suivant : L’Empire du Milieu s’étend