Si la Fiac a longtemps mélangé le contemporain et le moderne, elle assume depuis quelques éditions son positionnement de « foire d’art contemporain ». Stratégie et effet de mode.
S'il fut un temps où la Fiac offrait à voir dans la même foulée art moderne et art contemporain – Picasso et Garouste, Matisse et Basquiat, Gonzalez et César… –, force est de constater que ce temps-là est bel est bien révolu. Plus les années passent et plus le label « Fiac » – rappelons qu’il renvoie au seul et unique « art contemporain » – se trouve vérifié.
C’en est fini aujourd’hui des stands comme celui de la galerie Gmurzynska, jadis à Cologne, aujourd’hui à Zurich, qui rassemblait, à elle seule, tout ce qui fait la grandeur du constructivisme. C’en est fini d’un stand comme celui de Jean Krugier de Genève qui était à même de réunir des trésors de dessins, de Cézanne à Giacometti. C’en est fini de ces prestations dignes d’un musée qui faisaient de la Fiac, il n’y a pas plus d’une quinzaine d’années, non seulement le temple de l’actualité mais aussi celui de certains aspects de la modernité.
Non point de nostalgie, mais un simple constat : la Fiac a plus que jamais le regard tourné vers l’art contemporain. Effet de mode ? Effet d’époque ? Effet de marché ? Il y va un peu de tout cela, mais cela n’empêche pas un petit lot de galeries de sauver la mise de la modernité. Et c’est tant mieux parce qu’il est important d’avoir toujours à l’esprit que l’art contemporain d’aujourd’hui est le moderne de demain. Que l’un et l’autre sont intimement liés et qu’il serait totalement inepte de l’oublier. La Fiac 2008 versant art moderne, donc.
Vieira da Silva, Bellmer, Atlan, Étienne-Martin : 4 ones-man Show
Quatre expositions monographiques parmi d’autres donnent le ton. Tout d’abord, celle consacrée par la galerie Jeanne Bucher à Vieira da Silva. Une façon de fêter le centième anniversaire de la vieille dame qui nous a quittés en 1992 à l’âge de 84 ans et de donner à voir ou revoir un ensemble de chefs-d’œuvre qui ont jalonné sa carrière.
De 1937 – date charnière où l’artiste met en place le style qui a fait son succès – à 1988, ce ne sont pas moins de quinze tableaux essentiels que la galerie a réunis. On y trouve Le Jeu de cartes (1937), son Hommage à Kafka (1950) – une pièce majeure qui a figuré dans la quasi-totalité de ses rétrospectives –, L’Arène (1950-1951) et Ariane (1988) – un de ses tout derniers grands tableaux blancs puissamment structurés.
Historique, l’exposition de Hans Bellmer (1902-1975) que présente Marcel Fleiss de la galerie 1900-2000, rassemble elle aussi toutes les époques du célèbre auteur de La Poupée. De la toute première période du maître à la dernière, dessins, gouaches et huiles composent comme un étonnant parcours dans l’œuvre dont la trajectoire se décline aux temps les plus sublimes de l’érotisme. Comme en atteste la reprise de son sujet favori, une tardive Demi-Poupée en bois peint, datée de 1972, caractérisant la tenace obsession qui gouverne tout l’œuvre.
Exclusivement consacrée aux peintures de qualité des principaux artistes de la Seconde École de Paris (1945-1965), la galerie Applicat-Prazan a fait le choix de présenter une exposition personnelle de Jean-Michel Atlan (1913-1960). Figure majeure de l’art informel, celui-ci a constitué une œuvre abstraite dont la marque singulière est faite d’un réseau de lignes noires épaisses qui contournent les formes comme si elles cherchaient à capter l’essentiel d’un rythme. Les peintures réunies à la Fiac sont exemplaires de ce style si particulier qui le distingue de ses congénères et détermine une abstraction sensible et humaniste.
Célèbre pour ses Demeures, Étienne-Martin (1913-1995) est l’hôte de la galerie Marwan Hoss qui s’en est fait le juste défenseur depuis de nombreuses années. Aussi, rien d’étonnant à ce que l’on trouve sur le stand de ce dernier un ensemble de sculptures caractéristiques de cet artiste dont les formes volontiers peintes balancent entre abstraction et figuration et jouent en rondeurs et en replis, en ouvertures et en clôtures.
Et toujours Picasso, Matisse, Arp, Grosz, Nolde et les autres
En quête d’un art résolument moderne, le visiteur de la Fiac trouvera encore son compte à la galerie suisse Henze & Ketterer qui a réuni un lot d’œuvres expressionnistes de Grosz, Heckel, Kirchner, Nolde, Pechstein... Chez Zlotowski, il revisitera les années 1920-1930 avec Schwitters, Arp, Janco, Le Corbusier, Léger, Ozenfant... À la galerie Denise René, celles d’une abstraction géométrique avec Josef Albers, Marcelle Cahn, Auguste Herbin, Vasarely... Chez Waddington Galleries, il retrouvera enfin ses chers et éternels Matisse, Picasso, Picabia et consorts. Bref, de quoi satisfaire son appétit d’histoire
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
L’art moderne de plus en plus rare
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°606 du 1 octobre 2008, avec le titre suivant : L’art moderne de plus en plus rare