Cet art français à l’international

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 6 mai 2014 - 793 mots

Depuis deux décennies, les artistes hexagonaux sont mieux reconnus sur une scène internationale qui tend à gommer les frontières.

Si devait être donnée une appréciation globale à la présence et la valorisation des artistes français à l’étranger, certainement pourrait-elle être « pas si mal mais peut mieux faire ».

Pas si mal car, depuis une vingtaine d’années, le regard des étrangers sur l’art français, et par voie de conséquence les opportunités qui leur sont offertes de s’exporter, se sont considérablement améliorés. Qui eût cru encore récemment qu’une galerie branchée comme Cherry and Martin, à Los Angeles, la même qui représente Bernard Piffaretti, proposerait en janvier 2014 une exposition « Supports/Surfaces is alive and well », associant les œuvres de Noam Rappaport et Jennifer Boysen à celles de Claude Viallat, Daniel Dezeuze, Noël Dolla et Louis Cane ? Le mouvement qui, dans les années 1980, a cristallisé en partie le rejet d’un art français jugé trop intellectuel, face à la montée en puissance d’une pratique expressive et spontanée à la Basquiat, bénéficie d’une nouvelle attention et il n’est pas le seul à s’exporter.

Des artistes à la carrière déjà longue sont vus dans de nombreux endroits de la planète – Christian Boltanski a exposé en 2013 au Museum of Old and New Art à Hobart en Tasmanie et récemment à Buenos Aires (Argentine), Annette Messager enchaîne les rétrospectives dans le monde et sera bientôt au Museum of Contemporary Art de Sydney, Daniel Buren développe des projets partout, etc. Mais les  plus jeunes générations gagnent une forme de reconnaissance à la fois institutionnelle bien plus étendue qu’auparavant : Camille Henrot a été distinguée à la dernière Biennale de Venise tandis que Cyprien Gaillard est défendu à l’étranger par Sprüth Magers (Berlin, Londres) ; Céleste Boursier-Mougenot et Sophie Calle de longue date par Paula Cooper (New York). Tatiana Trouvé a intégré l’écurie Gagosian ; Laurent Grasso est régulièrement montré par Sean Kelly (New York) ; Saâdane Afif expose chez Mehdi Chouakri (Berlin) et Xavier Hufkens (Bruxelles) ; Latifa Echakhch, qui en 2013 a exposé au Hammer Museum de Los Angeles, est représentée par Eva Presenhuber (Zurich) et Kaufmann Repetto (Milan)… Faut-il alors s’auto-satisfaire de ce regain d’intérêt pour l’art français ? Certainement pas, car des blocages demeurent et tous les artistes français ne profitent évidemment pas de cette ampleur de champ.

Nouvelle génération
Française installée à Berlin, la galeriste Esther Schipper, qui représente Dominique Gonzalez-Foerster, Pierre Huyghe et Philippe Parreno, estime toutefois la problématique dépassée : « Cette question de l’attractivité de l’art français me rend un peu allergique. Il y a certainement eu une crise à un moment donné sur le fait que Paris était la métropole de l’art contemporain d’une grande part du XXe siècle, et qu’à partir des années 1960 New York a pris la relève et puis se sont développés d’autres centres comme Londres. Mais depuis le début des années 2000, avec la globalisation du monde de l’art, il existe des centres commerciaux et des artistes émergents dans des contextes culturels qui, tout à coup, attirent une attention énorme, et l’on ne plus raisonner de la même manière. »

La mondialisation a fait bouger les lignes et le salut passe désormais par l’étranger et la mixité, d’autant que Paris n’est plus viable pour un jeune artiste (location de l’atelier, coûts de production d’une œuvre). « Aujourd’hui, la scène française est de plus en plus présente à l’international, c’est vraiment lié à une nouvelle génération de commissaires, de critiques, d’artistes, moins introvertie qu’il y a vingt ans. La plupart de ceux qui ont fait l’effort de partir à l’étranger ont développé des réseaux internationaux », relève Olivier Antoine, directeur de la galerie Art : Concept (Paris), qui pointe néanmoins un positionnement des institutions françaises parfois à contre-courant des nécessaires développements internationaux. « Pour aller plus loin, il faudrait passer au-dessus des réflexes nationalistes et cautionner une scène française sans complexe, qui a sa place dans une représentation internationale, comme l’a fait Christian Bernard au Mamco de Genève en montrant depuis 1994 des Français au côté de superstars allemandes ou américaines, ce que l’on ne fait pas en France », ajoute-t-il.

Reste l’épineuse question du marché local et mondial et de la pointure de ses acteurs. Un observateur note ainsi : « Il faut recontextualiser la question de la visibilité et de la puissance commerciale par rapport à la taille du pays. Les suprématies américaine et chinoise s’expliquent par leur puissance économique, leur taille, et donc un nombre d’artistes beaucoup plus important, mais aussi de collectionneurs. Le marché américain est soutenu par une vingtaine de méga-collectionneurs, cela fait toute la différence avec la France où le marché n’est pas soutenu. Si nous avions dix François Pinault, la situation ne serait pas la même ! »

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°413 du 9 mai 2014, avec le titre suivant : Cet art français à l’international

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