PARIS [01.12.17] - La Cour de cassation a confirmé, le 14 novembre 2017, la relaxe prononcée en 2015 au bénéfice de Jean-Michel Ribes, directeur du théâtre du Rond-Point, et de Pascale Vurpillot, éditrice française du texte, dans la procédure pénale initiée par l’Agrif.
L’année 2011 fut marquée par de très violentes réactions à l’encontre de la création artistique interrogeant le rapport à la religion et notamment à la figure de Jésus. Du vandalisme physique de l’œuvre Piss Christ en Avignon, aux manifestations régulières contre les représentations publiques des pièces Sur le concept du visage du fils de Dieu et Golgota Picnic à Paris, la liberté de diffusion de la création artistique souffrait des revendications exacerbées de nombreuses associations catholiques et d’actes isolés de fanatiques menaçant par lettres anonymes ou dépôts de lame de cutter les responsables des lieux de diffusion.
La contestation s’était également portée sur le terrain judiciaire. Ainsi, l’Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l’identité française et chrétienne (Agrif) avait porté plainte avec constitution de partie civile à l’encontre de Jean-Michel Ribes et de Pascale Vurpillot en reprochant à certains propos contenus dans la pièce écrite par Rodrigo Garcia de présenter l’iconographie chrétienne comme une image de la terreur et de la barbarie, et d’en faire un support pour apprendre aux enfants à faire le mal. Plus précisément, l’Agrif soutenait que la pièce qualifiait l’iconographie chrétienne d’« iconographie de la terreur » et de « propagande pour la perversion, le tourment et la cruauté », apprenant aux enfants « à faire le mal », en imputant aux « héritiers d’un tel legs graphique » la responsabilité des crimes les plus odieux qui se commettent à travers le monde (assassinats, viols d’enfants, tournages de snuffmovies, guerres).
Cette procédure pénale intervenait après les tentatives échouées de faire interdire, devant les juridictions administrative et judiciaire, les représentations publiques. L’association estimait que la liberté d’expression, aussi légitime soit-elle, ne justifiait pas, y compris en matière artistique, de tels excès et une telle incitation à la haine envers les chrétiens, directement visés par-delà le Christ lui-même, tant par la nature des propos que par la mise en scène, particulièrement obscène et dégradante.
Pour autant, la Cour de cassation vient de confirmer pleinement l’analyse rendue par la cour d’appel de Paris en 2015 selon laquelle les propos incriminés par l’Agrif « sont tirés d’une œuvre de fiction à vocation artistique ne prétendant, en tant que telle, à l’affirmation d’aucune vérité mais participant de l’échange des idées et opinions indispensable à toute société démocratique sous réserve des seules limites fixées par la loi ».
En l’occurrence, les juges avaient retenu que les propos de la pièce visés par la plainte, « quelque provocateurs, voire choquants pour certains chrétiens, qu’ils soient, se rapportent à une image de Jésus Christ totalement inventée et désacralisée, de sorte qu’ils ne peuvent être pris au pied de la lettre, ni induire une quelconque animosité ou sentiment de rejet à l’égard de l’ensemble des personnes qui se réclament de celui-ci ».
En ce qui concernait les propos relatifs à l’iconographie religieuse, présentée comme cruelle et perverse, ceux-ci ne peuvent être interprétés comme visant précisément et spécifiquement les chrétiens, dès lors que le legs graphique ainsi dénoncé participe de l’héritage culturel commun au monde occidental.
Dès lors, par leur sens et leur portée, les propos litigieux de « Golgota Picnic » ne tendent pas à exhorter quiconque à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’un groupe déterminé de personnes en raison de leur appartenance religieuse et ne peuvent ainsi constituer une faute civile au sens de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.
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Pour la Cour de Cassation Golgota picnic ne comporte pas de propos attentatoires aux chrétiens
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