Unseen Photo Fair confirme sa singularité

Depuis sa création en décembre 2001, le Fotografiemuseum Amsterdam (FOAM) est devenue une référence par la qualité de ses différentes activités consacrées autant à la photographie documentaire, historique que contemporaine. Expositions de qualité et édition de FOAM magazine l’ont placé parmi les institutions les plus en vue. La création en 2012 par le musée de la foire Unseen Photo Fair a signé un positionnement – montrer des travaux inédits ou récents de jeunes photographes – dont le succès, l’intérêt grandissant auprès du public, des curateurs et des responsables d’institution de renom ou de directeurs de foire (tel Julien Frydman de Paris Photo) s’est confirmé lors de sa troisième édition qui s’est achevée à Amsterdam dimanche 21 septembre.

« Dans les foires dédiées à la photographie ou l’art contemporain, on voit toujours les mêmes galeries avec les mêmes artistes, voire les mêmes photos », constate Marloes Krijnen, directrice du FOAM et fondatrice d’Unseen. « Or il y a tant d’autres choses à découvrir et à acquérir ; FOAM Talent le montre chaque année. Et c’est ce qui nous a incités à créer Unseen. »

« FOAM s’est toujours occupé des jeunes talents », rappelle-t-elle. « Chaque année FOAM Magazine organise le concours FOAM Talent ouvert aux moins de 35 ans donnant lieu à la présentation des travaux des lauréats », au nombre de 21 en 2014 pour 1473 candidats originaires de 71 pays, et objet actuellement à Paris de l’exposition « FOAM Talent 2014 » dans les anciens locaux de l’Institut néerlandais.

Avec Unseen, FOAM prolonge cette initiative. « Le prix de location entre 4000 et 8000 euros selon la grandeur du stand est volontairement bas pour permettre aux galeries de prendre des risques que ce soit dans le choix du photographe ou des travaux inédits », souligne Marloes Krijnen. Galeries qui sont tenues de leurs côtés à vendre des photographies à un prix bas (1000 euros en moyenne) afin de permettre au plus large public d’acheter.

Pour sa troisième édition dans le cadre enchanteur du parc culturel de la Westergasfabriek, territoire des bâtiments industriels de l’ancienne fabrique de gaz de la ville où la foire s’installe pendant cinq jours, Unseen n’a pas dérogé à ces principes directeurs, « se montrant même bien plus précis, plus vigilant dans sa sélection », selon Marloes Krijnen. Effectivement la plupart des travaux exposés par les 54 galeries sélectionnées (sur les 75 galeries qui avaient candidaté) présentent des clichés inédits ou récents produits entre 2012 et 2014, à quelques exceptions près comme pour la galerie Alex Daniëls-Reflex d’Amsterdam avec Daido Moriyama.

Sur les stands, particulièrement bien aménagés et logés tous à la même enseigne, transparaît la ligne éditoriale claire et radicale d’Unseen comme l’internationalisation de la foire : 73% des galeries internationales pour 28% néerlandaises. Si aucune galerie nord ou sud-américaine n’a encore fait le déplacement, rivalisent en propositions de grande qualité galeries allemandes (11), anglaises (6), belges (4), françaises (4) danoise (1), japonaises (2), sud coréenne (1), chinoise (1), espagnole (1), indonésienne (1), émirati (1), italienne (1), suisse (1), slovène (1), hongroise (1), finlandaise et turque (1). Certaines parmi elles font partie de la sélection régulière de Paris Photo telles Les Filles du Calvaire (Paris), Taik Persons (Helsinki), Robert Morat (Hambourg) ou Fifty One (Anvers). D’autres comme Mirko Mayer (Cologne), Flowers (Londres) ou Hada Contemporary (Corée du Sud) formant un autre corpus de galeries de référence en matière de photographie contemporaine.

Parmi les faits marquants de cette édition : la proportion importante de femmes parmi les artistes sélectionnés par les galeristes à la différence de Paris Photo et des autres foires. Citons entre autres Marianna Rothen, Marina Gadonneix et Sylvie Tillman chez Kaune, Posnik, Spohr Gallery (Cologne), Charlotte Dumas à la Galerie Paul Andriesse (Amsterdam) ou Delphine Burtin et Friederike Von Butler à la Gallery Fifty One (Anvers) ou encore Hannah Whitaker (FOAM Talent 2014), Letha Wilson et Isabelle Le Minh à la Galerie Christophe Gaillard (Paris). Idem chez NextLevel (Paris) avec Céline Neiszawer et Asako Shimizu ou Grace Kim et Anna Di Prospero à la galerie Madé (Paris). A la différence de la photographie historique et moderne, du moins ce qui en a été montré jusqu’à présent, la photographie contemporaine compte de fait une grande proportion de femmes de talent ce que les autres foires ont tendance à oublier.

L’autre caractéristique d’Unseen tient à la visibilité donnée aux expériences, approches innovantes menées à partir de la photographie, flirtant avec l’expérimentation, l’installation ou la performance ouvrant notamment à des créations à l’intersection de la photographie et de la sculpture. L’édition 2014 de Paris Photo, jusque-là peu ouverte à ces créations, entend les incorporer. Quant au livre photo, il tient une place importante dans la foire et dispose de son propre bâtiment, le magazine d’Unseen lui-même est l’objet d’une parution dépassant le catalogage simple des galeries exposées.

Enfin, la dernière particularité d’Unseen par rapport aux autres salons tient au fait que la foire est aussi un festival photo dont la programmation au FOAM ou sur le site même de Westergasfabriek ouvre à des expositions spécifiques centrées sur la création actuelle auxquelles viennent s’associer les galeries photo et autres grandes institutions muséales de la ville dans une ambiance décontractée qui participe à la popularité d’une foire avant tout tournée vers la création actuelle, et ouvrant pour les galeries internationales à une clientèle d’amateurs et de collectionneurs différentes des autres foires.