GENÈVE (SUISSE) [11.02.13] – La municipalité de Genève vient de présenter un projet remanié d’extension – signé Jean Nouvel – pour le Musée d’Art et d’Histoire. Les élus espèrent qu’il soit rapidement validé car les mécènes s’impatientent et le musée vétuste devient dangereux pour la préservation des collections.
Depuis 1998, le projet d’extension et de rénovation du musée d’Art et d’Histoire (MAH) de Genève est dans l’impasse. Tour à tour encouragé par la municipalité qui gère l’institution, décrié par les défenseurs du patrimoine, oublié, remanié, le projet de Jean Nouvel est encore bien loin de devenir une réalité.
Outre la rénovation complète du bâtiment, jamais restauré depuis sa construction en 1910, l’équipe d’architecte de Jean Nouvel prévoyait initialement un agrandissement des locaux avec la construction d’une structure moderne en verre dans la cour intérieure du bâtiment. Pourvue d’un forum en sous-sol et haute de 3 étages, l’aile moderne du bâtiment devait accueillir un auditorium, des espaces d’expositions et un restaurant panoramique.
La dernière tentative de validation du projet en 2011 s’était soldée par un nouvel échec. L’association Patrimoine suisse s’était opposée à la construction car le projet lui semblait dénaturer l’édifice historique et contrevenait au principe de préservation du patrimoine. De plus, l’élévation du nouveau bâtiment excédait les limites imposées dans le périmètre de la vieille ville. Face à ces arguments, la Commission des monuments, de la nature et des sites (CMNS) avait alors refusé le dossier.
Mais depuis le 7 février 2013, le projet de rénovation et d’agrandissement du MAH est à nouveau d’actualité. La ville de Genève vient en effet de présenter aux acteurs concernés une version révisée du plan initial. En réponse aux contestataires qui reprochaient à la première version de dénaturer le musée, les architectes ont réduit les nouvelles surfaces au sein même de l’édifice historique. Cette perte d’espace sera cependant largement compensée par l’augmentation significative de la surface du sous-sol, à tel point que le futur MAH pourrait disposer de près de 28 000 m2, soit une augmentation de 1280 m2 par rapport au projet précédent (10 000 m2 de plus que ce que l’édifice actuel peut proposer). Le forum souterrain prévu dans le premier projet reste donc d’actualité mais se situera désormais sous la cour des Casemates (située à l’arrière du musée) et non sous la cour centrale du MAH. En surface, le musée songe également à s’adjoindre les bâtiments qui entourent la cour des Casemates et dont l’architecture est stylistiquement proche du MAH.
Principal mécène du projet d’agrandissement, le collectionneur vaudois Jean Claude Gandur s’est déclaré « enthousiaste » après avoir pris connaissance des modifications apportées au projet. Cette nouvelle ébauche ne fait cependant pas toujours l’unanimité chez les donateurs, comme l’a indiqué le président de la Fondation pour l’agrandissement du MAH Renaud Gautier qui, interrogé par Le Temps, a considéré que « Le projet est intéressant mais ne correspond pas au plan initial […] Je dois donc en parler avec le conseil de fondation afin de vérifier s’ils sont encore partants.»
Si la nouvelle version du projet d’agrandissement a cette fois-ci obtenu l’aval de la CMNS, les associations de défense du patrimoine n’ont pas encore rendu leurs conclusions. Robert Cramer, président de Patrimoine suisse, a cependant rappelé que « toute construction dans la cour tend, à notre sens, à dénaturer le monument ». Or, la mise en place du cube de verre de trois étages à l’intérieur de la cour du MAH constitue précisément une des raisons pour lesquelles les détracteurs du projet ont opposé leur véto dans le passé.
Les défenseurs du patrimoine devraient faire connaître leur décision dans les prochaines semaines. Le temps presse cependant. Car si le conseil municipal peut encore compter sur le solide apport de nombreux mécènes, il n’oublie pas que cette aide financière comporte une clause temporelle. Jean Claude Gandur, qui avait rejoint le projet en 2010 - avec une promesse de don de près de 14 millions d’euros et un accès à ses propres collections - a en effet exigé que les travaux aient commencé avant mars 2018, sous peine de retirer son soutien à l’institution.
La perte des financements n’est cependant pas la seule crainte du MAH. Un nouveau report de l’extension du musée ne pourrait que nuire au développement et à l’attractivité de l’institution tout autant qu’à la préservation des collections. En 2007, un pan de la corniche du plafond de la salle Baszanger s’effondrait provoquant la fermeture de la partie beaux-arts du musée. Six ans plus tard, la situation ne s’est pas améliorée, bien au contraire. On a récemment enregistré des températures de 12° dans la galerie des peintures qui a dû être fermée au public. « Les collections ont souvent froid et prennent parfois de l’eau sur la tête, comme l’automne dernier » rappelle Jean-Yves Marin, le directeur du MAH.
Si les protagonistes ne parviennent pas rapidement à s’entendre, le sort du projet de Jean Nouvel et celui du MAH se décidera dans les urnes. Pratique démocratique courante de la Confédération, il n’est pas rare que les citoyens soient appelés à trancher quand leurs élus ne parviennent pas à un compromis.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Un nouveau projet d’extension et de restauration pour le MAH de Genève
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Projet de restauration et agrandissement du Musée d'art et d'histoire de Genève © Photo courtesy Musée d'art et d'histoire de Genève
Façade du Musée d’art et d’histoire de Genève - © Photo Zeke - 2007 - Licence Free Art License 1.3