CHAMBÉRY [05.10.12] – Après un chantier de restauration de trois ans, la Sainte Chapelle, joyau de l’ensemble architectural du château des ducs de Savoie et ancienne demeure du saint suaire a rouvert ses portes aux fidèles et aux curieux.
Voilà presque trois ans que les grandes portes de chêne sculptées de la Sainte Chapelle de Chambéry étaient closes. Une attente qui devenait longue pour le public, si l’on se fie aux quelques 5800 visiteurs qui s’y sont pressés les 13 et 14 septembre dernier, à l’occasion de la réouverture de l’édifice. Il faut dire qu’elle ne manque pas d’allure ni de prestige la chapelle des ducs de Savoie, avec sa façade baroque aux grandes colonnes, son bâtiment gothique, son clocher qui abrite le plus grand carillon d’Europe, sans oublier l’aura mystique qui sied à un édifice qui a abrité pendant quelques décennies le Saint Suaire.
Au XIIIe siècle, quand le premier duc de Savoie fait de Chambéry sa capitale - un choix réfléchi car la position géographique de la ville assurait le contrôle de trois grands axes de commerce médiévaux qui feront la fortune de la maison de Savoie pendant des siècles – il décide, inspiré par la cour de Bourgogne, la construction d’un lieu de culte prestigieux dans l’enceinte de son château. Décorés par des sculpteurs flamands et bourguignons de renom, l’édifice d’inspiration gothique se compose d’une nef et d’une seule travée associée à un chœur et une abside polygonale. La Sainte Chapelle atteint son apogée en 1506 avec l’arrivée du Saint Suaire dans ses murs, conservé dans une chasse d’orfèvrerie derrière le maître autel. Les pèlerins affluent des quatre coins de la chrétienté pour voir la relique jusqu'à ce qu’un important incendie en 1532 et la campagne de 1536 menée par François Ier contre la Savoie ne décident le duc Emmanuel-Philibert à faire transférer le linceul du christ à Turin. Au XVIe siècle la chapelle avait été décorée par un ensemble de verrières uniques en leur genre illustrant la passion et la glorification du christ. Dotée d’une façade baroque réalisée par l’architecte piémontais Amadeo di Castellamonte au milieu du XVIIe siècle, le dernier élément monumental du décor de la Sainte Chapelle est apporté en 1836 par Casimir Vicario qui réalise un immense décor en trompe l’œil sur la voûte principale de l’édifice.
Devenue monument historique à la fin du XIXe siècle, la Sainte Chapelle de Chambéry n’avait plus connu de grand chantier de restauration depuis les années 1950. En novembre 2009, l’état de dégradation du décor de la voûte, ainsi que la nécessité de remettre le bâtiment aux normes avait décidé le conseil général de Savoie à lancer les travaux. Ce projet d’environ 3 millions d’euros a été réalisé avec le concours de l’état – qui a financé la rénovation à hauteur de 40% - et la conservation régionale des monuments historiques.
Le chantier a été dirigé par Jean-françois Grange-Chavanis, Architecte en Chef des Monuments historiques, en collaboration avec Pascal Duméril. Particularité qui mérite d’être soulignée, la rénovation du bâtiment s’est accompagnée d’une intervention archéologique préventive ainsi que d’un suivi scientifique du chantier. Les relevés effectués sur les liaisons entre la nef, les voûtes et les chapelles latérales ont fourni de précieuses informations pour l’archéologie du bâti.
Pour faciliter la restauration et assurer l’étanchéité de la voûte, la toiture a d’abord été entièrement rénovée. Des analyses stratigraphiques ont ensuite été effectuées avant d’entamer, perchés sur des échafaudages de 23 m de hauteur, la patiente restauration de l’ensemble du décor mural ainsi qu’un « repiquage » de pigments sur la voûte appliqués à l’aide d’un badigeon et d’une base de couleurs acryliques de type « Lascaux ». En outre, le nettoyage occasionné par les travaux a permis la mise au jour de plusieurs têtes d’anges qui décoraient les clés de voutes ainsi qu’une signature de Vicario. En complément de la restauration de la voûte de la chapelle, les travaux ont également porté sur les murs qui ont été entièrement ré-enduits au mortier de chaux grasse afin que son ton ocre fasse mieux ressortir les éléments de décors architecturaux.
Concernant l’aménagement de la Sainte Chapelle, l’électricité et le chauffage du monument ont été remis à neuf, et l’édifice est désormais pourvu d’un nouveau mobilier. De grands bancs de noyers conçus par une équipe de designers contemporains occupent désormais la nef, tandis qu’une banquette de frêne court tout autour de la chapelle dissimulant l’installation électrique et rappelant ainsi la disposition ancienne du mobilier. La Sainte Chapelle exhibera désormais un fac-similé très rare du Saint Suaire (seulement 4 copies existent) que l’archidiocèse de Turin a récemment offert à l’archevêque de Chambéry.
Si la majeure partie des rénovations est désormais terminée, quelques éléments du bâtiment subiront prochainement quelques interventions. La porte en chêne sculptée de la chapelle, réalisée en 1675 par François Cuénot sera rénovée, de même que le grand orgue de la Sainte Chapelle qui sera acheminé en pièces détachées jusqu’à Paris pour être confié à Éric Brottier, expert organier et ingénieur conseil pour le ministère de la culture.
Malgré son ouverture au public lors des dernières journées du patrimoine, la Sainte Chapelle de Chambéry demeure avant tout un édifice dédié au culte. Des visites guidées ont cependant été mises en place tous les samedis et les dimanches après midi depuis le 1er octobre.
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La Sainte Chapelle de Chambéry restaurée
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Abonnez-vous dès 1 €Sainte Chapelle du Château des ducs, Chambéry, Savoie - © Photo Florian Pépellin - 2012 - Licence CC BY-SA 3.0