Musée en herbe (Paris)

Victor Vasarely en attendant la rétro

Du 15 mars au 31 décembre 2012

Par Colin Cyvoct · L'ŒIL

Le 22 février 2012 - 753 mots

Boudée par les institutions, l’œuvre de Vasarely est exposée à partir
du 15 mars au Musée en herbe, à Paris, dédié aux enfants. En attendant, un jour peut-être, une grande rétrospective muséale…

Vasarely, vous dites Vasarely ? Mais qui connaît encore cet artiste majeur de la seconde moitié du XXe siècle ? Hélas, depuis trop longtemps, son nom apparaît plus souvent dans les médias à l’évocation de l’interminable saga judiciaire associée à la Fondation Vasarely qu’à propos de ses réalisations. L’œuvre de l’auteur du portrait de Pompidou suspendu dans le hall du centre éponyme depuis son ouverture est largement négligée par les institutions françaises. Jamais elles n’ont accueilli à ce jour de rétrospective Vasarely. Heureusement, des galeries font encore leur travail, avec beaucoup d’exigence et de talent, comme la galerie parisienne Lahumière qui présentait l’automne dernier, dans le 3e arrondissement, une rétrospective « muséale » (une quarantaine de pièces de 15 000 à 400 000 euros) accompagnée d’un catalogue soigné [L’œil n°641].

Une renommée internationale
Né à Pecs en Hongrie, Victor Vasarely (1908-1997) se passionne très tôt pour les recherches des artistes constructivistes russes. Le jeune homme abandonne ses études de médecine à la faculté de Budapest pour s’inscrire en 1927 à l’Académie Podolini-Volkmann, puis l’année suivante à l’Académie Mühely. Il y suit l’enseignement de Sandor Bortnyik, qui avait côtoyé Josef Albers et Moholy-Nagy au Bauhaus de Weimar. Durant ses années de formation, Vasarely acquiert la conviction que l’art et l’architecture doivent s’adapter aux contraintes et à l’influence du monde industriel moderne, avec une confiance jamais démentie dans le progrès, les sciences et la technique.

Dans l’atelier de Bortnyik, il choisit d’étudier l’affiche publicitaire, se consacre à l’étude de la ligne et analyse les syntaxes rigoureuses des structures graphiques qu’il met à jour. Ses créations utilitaires tentent d’introduire des formes nouvelles dans l’univers de la consommation quotidienne. À son arrivée à Paris en 1930, il travaille pour des agences publicitaires comme Havas, Draeger ou Devambez, avec, disait-il, « une réussite graphique indéniable dans une branche importante des arts appliqués et aussi des revenus confortables ».

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, Vasarely fait connaissance avec une jeune galeriste : Denise René. La rencontre est déterminante. « Il n’était pas encore peintre », déclarait la galeriste dans un entretien en 2001, ajoutant « c’est en 1948 qu’il peut enfin produire un tableau abstrait ». Commence alors la grande aventure de l’Art cinétique et de l’Op Art (Art optique) qui illuminera les années 1960. Jusqu’à sa disparition un demi-siècle plus tard, Vasarely n’a cessé de poursuivre ses recherches à partir d’un répertoire d’éléments géométriques fondamentaux : cercle, carré, losange, triangle, hexagone et autres polygones. Précédant Andy Warhol, il développe la réalisation de multiples afin de rendre ses œuvres accessibles au plus vaste public possible.

Artiste de renommée internationale, il intervient sur de nombreux édifices, réalise d’importantes compositions architecturales pour l’École pédagogique d’Essen ou la Cité universitaire de Caracas, et deux grandes fresques polychromes dans le hall de la gare Montparnasse à Paris (1971), en piètre état aujourd’hui ! C’est lui aussi qui conçoit le logo Renault en 1972, mais qui s’en souvient ?

Jeux « pédagoptiques »
On ne peut que se réjouir que le Musée en herbe, un lieu associatif innovant dédié aux enfants, accueille une exposition riche de soixante-trois œuvres originales de Vasarely, datées de 1934 à 1977. Situé depuis quatre ans au cœur de Paris, à quelques centaines de mètres du Centre Pompidou, cet espace réalise un remarquable travail de médiation culturelle auprès des jeunes publics, mais pas seulement, puisqu’un tiers des visiteurs est constitué d’adultes non accompagnés d’enfants.
Une pédagogie animée, fondée sur le jeu et l’humour, est ici particulièrement pertinente. Victor Vasarely composa un alphabet plastique composé de pièces aux formes géométriques régulières et aux teintes variées. Chaque pièce du puzzle peut être déplacée et se substituer à une autre pièce dans la composition, offrant ainsi un très grand nombre de combinaisons possibles. Jeux d’optique, illusion du mouvement, l’œuvre de Vasarely se prête bien à des questionnements riches de sens et permet aux médiateurs culturels de proposer aux enfants, dans un espace réservé aux ateliers, des jeux, manipulations et autres énigmes.

Invités à accompagner cette exposition Vasarely, une figure historique de l’Art cinétique, Cruz-Diez, et deux jeunes artistes, József Bullás et Djeff Regottaz exposeront successivement dans « Ma Première Galerie », au premier étage du Musée en Herbe.

« Vasarely vous a à l’œil ! »

Musée en herbe, 21, rue Herold, Paris-5e, du 15 mars au 31 décembre 2012, www.musee-en-herbe.com
www.lahumiere.com

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°644 du 1 mars 2012, avec le titre suivant : Victor Vasarely en attendant la rétro

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