Alain Fontanel est premier adjoint au maire de Strasbourg et vice-président de l’Eurométropole, en charge notamment de la politique et de l’action culturelle.
L’Œil Qu’est-ce que la Neustadt ? Pourquoi l’inscrire au Patrimoine mondial
de l’Unesco ?
Alain Fontanel - La Neustadt est un terme qui s’est imposé progressivement pour nommer
la ville nouvelle construite pendant l’annexion. Auparavant, on parlait de ville impériale ou allemande, deux appellations qui montrent la relation ambiguë que les Strasbourgeois ont eue avec cet ensemble urbain. Il s’agit en effet d’une ville construite par l’occupant, qui avait auparavant détruit une partie de la cité pendant le siège de 1870. Occupant qui a par ailleurs fait payer aux habitants la construction et qui a imposé une architecture dite « des Néo » (néoclassique, néobaroque) qui était peu appréciée et perçue comme une rupture avec la Vieille Ville. La Neustadt a longtemps été mal aimée, a fortiori après la Seconde Guerre mondiale. Par exemple, le palais du Rhin, ancien palais du Kaiser puis siège de la Kommandantur, était devenu le symbole de cette occupation violente. Au lendemain de la guerre, il a failli être détruit et n’a été classé Monument historique qu’en 1993. Il a fallu pratiquement quarante ans pour que les Strasbourgeois se réapproprient ce patrimoine et lui trouvent une signification urbaine. Car la Neustadt était un projet politique du Reich et du Kaiser pour dépasser le traumatisme des destructions du siège, mais aussi pour agrandir et moderniser une ville engoncée dans ses fortifications et permettre l’installation d’institutions allemandes et d’une importante population dans la capitale d’Alsace-Lorraine. Enfin, c’était aussi un projet social avec une politique hygiéniste avant-gardiste. Or, la compréhension de ces enjeux et de l’harmonie recherchée avec la Vieille Ville ; tout cela n’a été redécouvert qu’à partir des années 1980. Aujourd’hui, candidater à l’extension du classement au Patrimoine mondial depuis la Vieille Ville vers la Nouvelle, c’est une manière de boucler la boucle de notre histoire. Une façon de se réapproprier notre double identité et de réaffirmer la dimension rhénane et franco-allemande de Strasbourg. Il est d’autant plus important de porter ce message-là à un moment où les frontières se ferment en Europe.
Pourquoi une procédure d’extension plutôt que la présentation d’un nouveau bien autonome ou une candidature croisée avec Metz qui possède un patrimoine similaire ?
L’extension du périmètre du bien déjà classé est vraiment en cohérence avec la démarche philosophique et politique du projet urbain initial. Car il ne s’agit pas de deux biens côte à côte, mais de deux ensembles urbains qui n’en forment qu’un grâce à une couture très fine. Nous nous étions aussi posé la question d’une candidature commune avec Metz, mais quand nous avons commencé à travailler sur ce sujet Metz n’avait pas encore assez avancé sur ce dossier. Parallèlement, nous espérons que l’Allemagne appuiera notre démarche, car il n’existe plus d’ensembles urbains comparables à la Neustadt chez nos voisins, puisque ce patrimoine a été détruit pendant la Seconde Guerre mondiale.
Quelles sont les autres opérations de valorisation de la Neustadt ?
Pour mobiliser les habitants, nous avons multiplié les visites et les conférences, qui ont rencontré un succès croissant. Il faut poursuivre ce travail de sensibilisation et de mise en tourisme, c’est notamment pour cela que nous venons de lancer l’application Monument Tracker. Pour conserver ce patrimoine, nous avons aussi souhaité élargir le périmètre du Plan de sauvegarde et de mise en valeur à la Neustadt. Enfin, le service de l’Inventaire de la région est en train d’achever sa mission sur ce quartier, ce qui donnera lieu à une publication et à une exposition.
Strasbourg possède déjà un bien sur la Liste du patrimoine mondial de l’Unesco : la Grande Île. La ville souhaite étendre son périmètre à la Neustadt, littéralement « ville nouvelle », un ensemble urbain construit pendant l’annexion allemande de 1871 à 1918.
Des constructions du début du XXe siècle de la Neustadt sont des édifices Art nouveau.
Biens figurent sur la Liste du patrimoine mondial de l’humanité de l’Unesco, dont 42 en France.
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Alain Fontanel : Le désir d’Unesco de Strasbourg
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°694 du 1 octobre 2016, avec le titre suivant : Alain Fontanel : Le désir d’Unesco de Strasbourg