Vous avez racheté la galerie londonienne Colnaghi en 2002. Dans quelles circonstances ?
Le rachat de Colnaghi est arrivé inopinément. Je n’y aurais jamais pensé si, en 2001, son propriétaire, Rudolf A. Oetker, ne m’avait pas appelé pour me le proposer. J’ai alors pensé que cela pouvait être une opportunité. Nous étions en pleines tractations lorsque les événements du 11-Septembre sont arrivés. Tout le monde m’a alors conseillé d’y renoncer, pensant que le marché de l’art allait s’écrouler. Mais quelque chose me disait qu’il fallait le faire et que le marché allait se remettre. J’ai signé le 14 janvier 2002 et je ne l’ai jamais regretté.
À quel moment Katrin Bellinger vous a-t-elle rejoint ?
J’ai approché Katrin Bellinger car j’avais besoin de quelqu’un à la galerie pour diriger le secteur des dessins anciens, qui jouissait d’une excellente réputation chez Colnaghi. L’idée de départ était de partager les locaux de Bond Street et de gérer nos affaires séparément. Finalement, notre association est devenue plus étroite, car nous avons racheté ensemble la bibliothèque et les archives de Colnaghi, qui n’étaient pas incluses dans mon contrat initial avec le groupe Oetker.
Quels changements avez-vous opérés en huit ans ?
Nous avons contribué à développer la clientèle de Colnaghi en Europe, grâce à nos liens en Allemagne et en multipliant notre participation aux grandes foires internationales. Tout en maintenant l’activité traditionnelle de Colnaghi que constituent les tableaux et dessins italiens, nous l’avons élargie aux œuvres flamandes et hollandaises du XVIIe siècle, aux artistes allemands du XVIe siècle – en particulier Cranach –, et du XIXe siècle. Nous présentons aussi des peintures françaises du XVIIIe siècle. Nous avons touché de nouveaux clients en organisant des expositions avec la galerie d’art contemporain londonienne Hauser & Wirth. Nos liens avec l’Allemagne ont aussi favorisé l’ouverture d’une troisième galerie de peintures près de Salzbourg en Autriche.
Quel a été votre parcours personnel ?
Fondée en 1864 par mon arrière-grand-père Lehmann Berheimer, la galerie Bernheimer était à l’origine spécialisée dans les textiles et tapis d’Orient, avant d’étendre son activité aux meubles italiens de la Renaissance, mobilier français, tapisseries, céramiques et objets d’art. Au tournant du siècle, elle est devenue le fournisseur de la cour de Bavière. Elle comptait parmi ses clients l’aristocratie européenne et des magnats américains tel William Randolph Hearst. Quand j’ai repris la galerie munichoise en 1977, je l’ai orientée vers les maîtres anciens du XVIe au XIXe siècle. Depuis peu, nous y organisons des expositions sur la photographie vintage et contemporaine.
Que vous a apporté le rachat de Colnaghi ?
La réputation de Colnaghi m’a ouvert des portes, celles des institutions notamment. Lorsque je vais aux États-Unis, je ne suis pas seulement Konrad Berheimer, je suis « Monsieur Colnaghi ».
Allez-vous fêter les 250 ans de la galerie ?
Après avoir exposé avec succès à la foire Tefaf à Maastricht, puis au Salon du dessin à Paris, nous avons programmé cet automne une grande exposition anniversaire qui retracera l’histoire de la galerie à travers des archives. Nous participerons à la Biennale des antiquaires, à Paris en septembre.
Quelle importance attachez-vous aux foires et salons internationaux ?
Une extrême importance, tant en termes de ventes que de visibilité de la galerie à l’étranger. Les foires nous permettent de nous faire connaître auprès d’une très large clientèle internationale. Mais nous pensons cependant qu’il faut maintenir une présence forte à Old Bond Street, au cœur même du marché de la peinture ancienne à Londres. Aussi nous montons en moyenne deux expositions annuelles à la galerie. Nous sommes également présents à la Master Paintings Week et à la Master Drawings London, à Londres en juillet.
Selon vous, à quoi tient la longévité de la galerie Colnaghi ?
Elle tient à une combinaison de deux choses, le maintien d’une tradition de l’excellence en termes de savoir et de connaissance et la capacité pour une galerie à s’adapter aux changements du marché.
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Entretien - Konrad Bernheimer, directeur de la galerie Bernheimer Fine Old Masters, Munich, et codirecteur de la galerie Colnaghi, Londres
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°324 du 30 avril 2010, avec le titre suivant : Entretien - Konrad Bernheimer, directeur de la galerie Bernheimer Fine Old Masters, Munich, et codirecteur de la galerie Colnaghi, Londres