Politique

Culture

Christine Albanel nommée Rue de Valois

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 30 juillet 2007 - 823 mots

L’ancienne conseillère de Jacques Chirac prend les rênes d’un ministère au périmètre préservé.

PARIS - Après maintes tractations, le nouveau président de la République, Nicolas Sarkozy, et son Premier ministre, François Fillon, ont désigné la très chiraquienne Christine Albanel à la tête du ministère de la Culture et de la Communication. Le nom de l’ancienne présidente de l’Établissement public du château et du domaine de Versailles circulait déjà depuis plusieurs semaines.

Christine Albanel présentait en effet le double avantage d’être issue de la société civile et d’être une femme, profil recherché par Nicolas Sarkozy pour satisfaire son engagement d’ouverture et de respect de la parité. Jean-François Hébert, qui présidait depuis 2002 la Cité des Sciences et de l’Industrie, à Paris, devient son directeur de cabinet. Cet énarque avait reçu en 2003 une mission sur l’accessibilité des établissements culturels aux handicapés. La surprise vient toutefois du fait que la ministre hérite d’un vrai portefeuille dédié à la Culture et à la Communication, alors que celui-ci était menacé d’être intégré à l’Éducation nationale. Christine Albanel aurait toutefois accepté, dans un premier temps, la double casquette, mais l’hostilité des milieux culturels a fait sagement renoncer le président. L’argument avancé pour cette fusion – développer l’éducation artistique à l’école – était par ailleurs maigre eu égard à la spécificité de nombreux dossiers de la Rue de Valois, sans liens avec l’Éducation nationale (monuments historiques, théâtre…).

Le maire de Périgueux, Xavier Darcos, qui obtient ce marocain sans surprise, semble mieux armé politiquement pour ce poste, où il devra gérer quelques problèmes épineux (carte scolaire, statut des enseignants). Pour Christine Albanel, la tâche sera lourde, d’autant plus qu’elle se voit attribuer le rôle de porte-parole du gouvernement. « C’est une grave erreur, commente un observateur, car c’est un métier à plein-temps, qui exige d’être au courant de tout ce que fait le gouvernement. D’autre part, il est tout de même contradictoire de faire du ministre de la Communication la voix du gouvernement ! De là à parler de ministre de la propagande ! ». Ce cumul a pourtant connu un précédent – peu convaincant – en 1997 avec Catherine Trautmann dans le gouvernement du socialiste Lionel Jospin.

Christine Albanel, qui sera déjà absorbée par les dossiers liés à la communication comme l’indique sa feuille de route (réforme du Conseil supérieur de l’audiovisuel, renforcement des aides à la presse, législation sur le secret des sources journalistiques…), risque donc de ne pas avoir beaucoup de temps à accorder aux sujets proprement culturels. Par ailleurs, étant issue de la société civile, la ministre risque d’avoir un poids très modéré pour obtenir des arbitrages budgétaires favorables, comme l’indique son rang protocolaire. Ses liens personnels avec Nicolas Sarkozy joueront peut-être en sa faveur, au moins dans un premier temps.

La ministre hérite de plus de la gestion hasardeuse de son prédécesseur, qui a laissé plusieurs dossiers complexes en jachère : intermittents du spectacle, droits d’auteur sur Internet, patrimoine… Elle devra aussi s’atteler à mettre en œuvre les très rares promesses du candidat Sarkozy en matière culturelle, notamment celle concernant la gratuité des musées nationaux, qui risque de s’avérer délicate. Lors de la passation de pouvoir le 18 mai, elle a indiqué vouloir s’engager en faveur de la création. La priorité sera également de rétablir la confiance envers les acteurs du milieu culturel, désabusés par l’attitude de Renaud Donnedieu de Vabres. Comme Jean-Jacques Aillagon en 2002, l’ancienne présidente de Versailles bénéficie d’un crédit inhérent à son implication dans les affaires culturelles. Espérons qu’elle ne l’épuisera pas aussi rapidement.

Une plume à la Culture

Née en 1955 à Toulouse, agrégée de lettres modernes, Christine Albanel a passé quasiment toute sa carrière dans l’ombre de Jacques Chirac, à la mairie de Paris, à Matignon, au RPR puis à l’Élysée, où elle fut chargée des questions culturelles de 1997 à 2000. Hormis deux mandats de conseiller régional d’Ile-de-France (1986-1992 puis 1998-2004), elle n’a jamais exercé de fonctions politiques. Si elle est toujours restée fidèle à son mentor dont elle écrivait les discours, elle s’est liée à Nicolas Sarkozy et a œuvré à son rapprochement avec les milieux culturels. Christine Albanel est également l’auteur de plusieurs ouvrages et de pièces de théâtre. En 2000, elle est nommée par la présidence membre du Conseil d’État, avant de rejoindre Versailles en 2003, où elle prend la tête de l’Établissement public du château et du domaine. Elle doit notamment s’atteler à lancer le plan du Grand Versailles, vaste programme de travaux échelonné sur douze années. Si elle est appréciée pour ses qualités humaines, Christine Albanel a aussi la réputation d’être une femme déterminée. Les syndicats lui ont toutefois reproché son manque de dialogue et sa volonté de recherche de rentabilité à tous crins, quitte à transformer Versailles en parc d’attractions. Certains déplorent notamment son choix d’avoir rendu payant l’accès aux jardins du Petit-Trianon et du Hameau de la Reine. Plusieurs membres de son équipe versaillaise devraient néanmoins l’accompagner Rue de Valois. Pour l’heure, son successeur qu’elle désignera elle-même, n’est pas encore connu.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°260 du 25 mai 2007, avec le titre suivant : Christine Albanel nommée Rue de Valois

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