Sans doute le Rhône fut-il pour César et ses contemporains un Fleuve de l’enfer – ce fleuve que les âmes traversaient pour gagner le monde des morts et que nul mortel, sinon Orphée, ne put franchir pour revenir vers les vivants.
À l’époque où César étendait son empire, au Ier siècle av. J.-C., ce fleuve qui coule de Genève à Arles engloutit cargaisons, statues, bas-reliefs, outils, objets de la vie quotidienne ou vestiges funéraires. On ne les revit jamais. Et pourtant, voici que, en 2007, Jules César ressurgit du fleuve, ou du moins ce qu’on tient pour être son buste en marbre. L’émotion fut à son comble et, à Arles, l’exposition « César, le Rhône pour mémoire, 20 ans de fouilles dans le fleuve à Arles », qui présentait le buste et d’autres trouvailles remarquables retrouvées à l’occasion de fouilles subaquatiques, fut un franc succès. Aujourd’hui, quelque quatre cents objets, exceptionnellement prêtés par le Musée départemental Arles antique et le Louvre – dont la célèbre Vénus d’Arles réclamée par Louis XIV dès sa découverte et qui sort seulement pour la troisième fois du Louvre ! –, s’invitent à Genève. L’originalité de l’exposition ? Mettre en avant le rôle de l’axe rhodanien dans les échanges de l’Antiquité, tout en racontant l’histoire et la vie d’Arles, « petite Rome » de l’Antiquité. Cerise sur le gâteau : en plus des objets phares exposés, le Musée d’art et d’histoire donne à découvrir des trouvailles récentes et inédites – comme une roue de char ou un coffret en bois, dont un trou laisse penser qu’il avait été dérobé par un voleur qui, après en avoir forcé la serrure, se serait débarrassé de l’objet compromettant dans le Rhône. Cette exposition pour petits et grands s’accompagne d’un catalogue didactique, rédigé par des spécialistes, pour prolonger, ou préparer, la visite.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°723 du 1 mai 2019, avec le titre suivant : Sauvés des eaux du Rhône