Sans doute Yves Saint Laurent a-t-il bien fait de ne pas persévérer dans la bande dessinée. Si l’on en croit la tentative que constitue son album La Vilaine Lulu, dont l’exposition présente quelques planches inédites, le génial couturier était manifestement plus inspiré quand il concevait ses collections.
Cependant, et s’il reste anecdotique, cet exemple est de ceux qui corroborent le constat des relations fécondes qu’entretiennent la mode et le neuvième art, reliés par le geste commun du dessin et par l’attention aux détails. Dans une volonté manifeste de décloisonnement, cette exposition multiplie les allers-retours entre les deux disciplines, de la garde-robe des personnages de fiction comme Little Nemoà l’influence exercée par les comics sur les « couturiers du baby-boom » : Jean-Charles de Castelbajac, Gianni Versace, Thierry Mugler, Jean Paul Gaultier, Dolce & Gabanna… en passant par la tradition des paper dolls, ces poupées de papier à habiller avec toute une gamme de tenues à découper et à fixer avec des onglets rabattables, que connut la génération d’après-guerre. On le sait moins, mais certains auteurs de BD se sont également aventurés dans l’univers du luxe. Ainsi de Milo Manara, qui dessina le story-board du film publicitaire du parfum N° 5, Le Loup, de Jean-Luc Besson, projeté dans l’exposition. Ou encore de l’album Jeune Fille en Dior, paru chez Dargaud en 2013 et signé de la dessinatrice Annie Goetzinger, qui suit la vie d’un vêtement depuis les premiers croquis jusqu’à la confection dans l’atelier. Bref, une histoire d’élégance graphique.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°726 du 1 septembre 2019, avec le titre suivant : Mode et bande dessinée, si loin, si proches