Chaïm Soutine : L'ordre du chaos

Le musée de l’Orangerie présente la rétrospective Chaïm Soutine, une exposition de quelques soixante-dix chefs-d’œuvre de l’artiste provenant de vingt-deux institutions pour redécouvrir un peintre à la personnalité complexe.

Eternel insatisfait, exigeant, colérique et discret, la personnalité de Soutine a largement participé à sa réputation d’artiste maudit. Pour la commissaire Marie-Paul Val, une rétrospective de Soutine était donc aussi l’occasion de porter un regard plus distant sur l’œuvre de l’artiste. Grâce à une approche thématique, qui partage la carrière du peintre entre portraits, paysages, natures mortes et figures, l’exposition démontre la volonté du peintre de s’inscrire dans une tradition artistique européenne, une dimension souvent occultée dans la compréhension de son œuvre.

Les portraits en première partie posent le décor : amis, mécènes, admirateurs, autant de personnalités qui entourent le peintre et nuancent quelque peu sa réputation d’antisocial. Les paysages ensuite, torturés, tourmentés, à la limite parfois de l’abstraction, souvent réalisés en série, comme la série des arbres réalisée à Chartres lors d’un séjour chez les Castaing. Sa Nature morte à la raie (1923) et ses carcasses éventrées sont autant de thèmes qui lient Soutine à la peinture européenne. Grand admirateur de Rembrandt entre autres, il ne cesse de le citer dans ses œuvres, jusqu’à reprendre la composition du maître dans son gigantesque Bœuf écorché (1925). Là encore, dans un travail qui relèverait presque de l’obsession, l’application de la matière et le travail des couleurs transcendent son sujet. Une qualité omniprésente dans ses figures humaines. Déformées, presque caricaturées, mais saisissantes de réalisme, leur représentation dépasse la personnification pour atteindre l’universel, l’archétype. Considérées comme les œuvres les plus connues de la carrière de l’artiste, elles trouvent ici leur juste place dans le cheminement artistique de Soutine.