Pierre et Gilles investissent le Musée d’Ixelles, en Belgique, puis le MuMa au Havre à partir du 27 mai, pour une rétrospective de leur œuvre à quatre yeux et à quatre mains.
Vous fêtez vos 40 ans de collaboration en 2017. Pourquoi avez-vous décidé de construire une œuvre commune plutôt que de suivre chacun une voie propre ?
Pierre Notre rencontre, lors d’une fête organisée par Kenzo, place des Victoires à Paris, a été un coup de foudre : nous sommes partis ensemble en scooter et ne nous sommes plus jamais quittés. J’étais alors un jeune photographe timide et signais des portraits pour Rock & Folk, en noir et blanc. Gilles Quant à moi, qui étais entré aux Beaux-arts du Havre à 15 ans et vivais à Paris depuis mes 18 ans, je faisais des illustrations, quelques peintures… Mais je n’étais pas épanoui. Notre première œuvre commune est arrivée un peu par hasard. J’avais une passion pour les photomatons, que je collectionnais. Un jour, pour nous amuser, nous avions tiré des portraits de nos amis, sur des fonds de couleur vive mais le résultat était terne et décevant. Comme je peignais de façon hyperréaliste, j’ai eu l’idée de retoucher les visages et les fonds.Pierre Nous revenions justement d’un voyage au Maroc, où nous avions découvert des photographies de stars saturées en couleurs, façon Bollywood. Gilles Dès lors, j’ai arrêté de peindre et Pierre de photographier de son côté. Pierre Nous nous sommes mis à travailler à la maison, où nous avons créé un petit théâtre. Nous y créons les décors, comme des artisans, et mettons nos modèles en scène.
Vous mettez régulièrement votre couple en scène dans vos œuvres, pourquoi ?
Pierre En effet, les autoportraits ponctuent les différentes époques de notre travail et racontent notre histoire. Ils sont l’occasion pour nous d’expérimenter avec plus de liberté. Gilles On aime bien, aussi, entrer dans des personnages – des marins, saint Pierre et saint Gilles… Nous sommes très influencés par le cinéma : pour nous, ces mises en scène très artisanales ont un côté Georges Méliès qui nous tient très à cœur. Notre maison est notre atelier, nos modèles sont nos amis… L’art et la vie sont pour nous indissociables.
L’un de vous n’a-t-il jamais été tenté de prendre son indépendance, pour des raisons personnelles ou artistiques ?
Gilles Non. Nous sommes un peu comme des enfants : il y a parfois de grands clashs, mais nous nous réconcilions aussitôt. Pierre J’ai parfois besoin de solitude, par exemple quand je m’occupe de l’éclairage. Gilles Et moi, quand je peins, je ne souffre aucun commentaire. On peut se faire des commentaires a posteriori et chacun prend en compte les remarques de l’autre, même s’il est contrarié sur le moment ! Pierre Et aussi, en créant et en signant ensemble, nous nous sentons protégés, moins vulnérables… Je ne voudrais pour rien au monde me retrouver seul sous les projecteurs !
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Pierre et Gilles : « En créant ensemble, nous nous sentons protégés »
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Abonnez-vous dès 1 €« Pierre et Gilles, Clair-obscur »
Jusqu’au 14 mai 2017. Musée d’Ixelles, rue Jean-Van-Volsem, Bruxelles (Belgique). Ouvert tous les jours de 9 h 30 à 17 h. Fermé le lundi. Tarifs : 8 et 5 €. Commissaire : Sophie Duplaix.
www.museedixelles.irisnet.be
« Pierre et Gilles, Clair-obscur »
Du 27 mai au 20 août 2017. Musée d’art moderne André Malraux, 2, boulevard Clemenceau, Le Havre (76). Ouvert tous les jours de 11 h à 18 h, 19 h le week-end. Fermé le mardi. Tarifs : 10 et 6 €. Commissaire : Sophie Duplaix.
www.muma-lehavre.fr
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°701 du 1 mai 2017, avec le titre suivant : Pierre et Gilles : « En créant ensemble, nous nous sentons protégés »