Lorsque la prestigieuse collection Bührle rencontre celle du Musée Wallraf, soixante-dix maîtres absolus de la peinture se retrouvent à Cologne. Cette exposition ambitieuse s’articule sur le mode thématique en traversant le Moyen Âge, le baroque néerlandais, la peinture française du XIXe impressionniste et post-impressionniste.
Le dialogue entre les œuvres en est le fil conducteur. Les toiles sont généralement présentées par paires ou par groupes selon leur lien historique, thématique, stylistique, leur proximité géographique ou temporelle, par affinités ou a contrario par oppositions. Un regroupement a priori banal, mais qui fonctionne très bien ici, d’autant que la scénographie interactive sert les échanges entre les œuvres et avec le spectateur. Le parcours s’ouvre sur deux paysages d’Albert Cuyp faisant partie d’une paire et réunis après deux cents ans : l’un représente la sérénité d’un clair de lune, l’autre la violence d’un ciel d’orage ; pourtant, par la juxtaposition de leurs contrastes, l’un fait partie de l’autre. Deux révolutionnaires de la peinture se retrouvent étonnamment voisins : le premier, Albrecht Dürer, vient de la Renaissance, le second, Georges Braque, est l’un des pères du cubisme. Nous voici à Venise sur le Grand Canal non loin du Rialto, Canaletto peint en regardant le sud-ouest, au même moment son neveu Bellotto capture la vue dans la direction opposée. Un « dos à dos » intéressant : le premier capte la lumière atmosphérique, les contours du second sont plus précis. Un bond au XIXe à Paris, capitale des arts. Les trois protagonistes : Delacroix le romantique, Courbet le réaliste et Fantin-Latour le traditionaliste sont alignés côte à côte : qu’ont-ils ici en commun, si ce n’est une proximité générationnelle ? Pourquoi les artistes, en l’occurrence Pissarro, Monet et Sisley, peignent-ils le même motif à partir du même endroit, dans la même perspective, mais pas au même moment ? Tous trois répondraient en chœur : pour l’atmosphère. Une maternité de Gauguin côtoyant celle d’un primitif : comment percevoir la relation entre le peintre moderniste et le maître ancien ? Cette confrontation est-elle un clin d’œil, une provocation ? Dans ce dialogue à travers les siècles, le plus « spirituel » des deux n’est celui que l’on croit....
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Dialogues entre maîtres absolus
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Abonnez-vous dès 1 €Musée Wallraf-Richartz et Fondation Corboud, Obenmarspforten 40, Cologne (Allemagne), www.wallraf.museum
Légende Photo :
Albert Cuyp, Bateaux de pêche au clair de lune, vers 1645, huile sur panneau, Wallraf-Richartz- Museum, Cologne © Photo Rheinisches Bildarchiv, Köln
Albert Cuyp, Orages sur Dordrecht, vers 1645, huile sur panneau, fondation collection E.G. Bührle, Zurich © Photo SIK-ISEA, J. P. Kuhn
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°695 du 1 novembre 2016, avec le titre suivant : Dialogues entre maîtres absolus