Art contemporain

Sans Titre (2000) l'odyssée de Tino Sehgal

Par Céline Piettre · L'ŒIL

Le 22 mars 2016 - 363 mots

Anthologie - On est en l’an 2000. L’artiste anglo-allemand d’origine indienne Tino Sehgal n’a pas encore investi les espaces muséaux avec les « installations performatives » qui le rendront célèbre, entre étreintes de corps, chants improvisés par les visiteurs et discussions philosophiques.

À l’époque, ce futur Lion d’or de la Biennale de Venise travaille en tant qu’interprète pour des compagnies de danse, tels les Ballets C de la B, et suit de près les expérimentations chorégraphiques d’un Jérôme Bel (avec qui il collabore pour The Show Must Go On) ou d’un Xavier Leroy. Terreau fertile qui aura certainement influencé le solo Sans titre (2000), une anthologie de la danse du XXe siècle, repris aujourd’hui par les chorégraphes Boris Charmatz et Frank Willens, et programmé par le festival Étrange Cargo. Ni musique, ni décor, ni costumes. La pièce se danse nu, dans un dépouillement qui annonce l’œuvre à venir. Même si le solo est conçu pour la scène, il a déjà un pied dans le musée – empruntant d’ailleurs à l’art contemporain son fameux titre Sans titre, en « exposant » une succession d’extraits phares de l’histoire de la danse. Une collection de gestes – des bras virevoltants d’Isadora Duncan aux dos ronds de Cunningham –  tout droit sortis des réserves immatérielles d’un musée de la danse qui reste une utopie. Mais attention : Sans titre ne succombe pas à l’aridité de ses désirs d’archiviste et à sa seule ambition conceptuelle. Elle ne se contente pas non plus de témoigner d’un temps où le sampling envahissait des pratiques éprises de postmodernité. Elle reste vivante, incarnée, du fait même de sa transmission à d’autres corps. Chaque interprète fait la traversée (de l’histoire de la danse) à sa manière. Rejoue dans sa chair ses scandales (l’orgasme chorégraphique de Nijinski), ses prémonitions (la montée du nazisme par la « sorcière » Mary Wigman), ses ruptures (la marche de Steve Paxton devenue chorégraphie). « On ne dansera jamais plus comme avant », murmure-t-on ici. Le retour aux origines est un bond vers l’avenir. C’est bien connu, l’odyssée transforme. À voir en attendant le retour de Tino Sehgal sur scène, pour une création en septembre à l’Opéra de Paris.

Quoi ?
Tino Sehgal, Sans Titre (2000)

Où ?
La Ménagerie de verre, à Paris

Quand ?
Du 31 mars au 2 avril, à 19 h 30

Comment ?
www.menagerie-de-verre.org

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°689 du 1 avril 2016, avec le titre suivant : Sans Titre (2000) l'odyssée de Tino Sehgal

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