Lesieur nous fait passer par la fenêtre

Un tel choix évite la tentation facile de la chronologie et a l’avantage de confronter entre elles, en recourant au hasard des années, les diverses manières dont le peintre aborde cet espace intermédiaire pour en faire un lieu privilégié entre l’univers clos des intérieurs et le monde ouvert de la nature extérieure. Par ce passage qu’il réserve à la lumière, à la transparence et au silence, Lesieur fait transiter ses émotions et donc les nôtres. Comme dans le poème de Baudelaire, les teintes douces posées en aplat, les fines arabesques esquissant les grilles des balcons et les senteurs des bouquets de fleurs sont en correspondance. Le discours pictural se nourrit du dialogue instauré à partir de ces éléments étirés suivant des verticales, qui se renouvelle en intégrant des formes diluées d’objets ou de rares silhouettes féminines. Au seuil des croisées, se découpent souvent des rectangles d’obscurité qui accroissent la profondeur (Fenêtre nuit au vase, 1995). Partant de l’harmonieuse composition en vert du début pour aboutir à la délicate scène automnale de la fin, le visiteur découvre que le lien réel et unique qui réunit la soixantaine de tableaux, dont plus de vingt appartiennent au musée à la suite d’une double donation, est d’abord une volonté de créer pour l’œil de la poésie pure, décantée, épurée.