Le Beyrouth de Gabriele Basilico

À la différence de Dresde ou du Havre rasés, leurs structures reconnaissables renvoient à ce que fut la vie dans cette « perle de l’Orient » avant que les communautés chrétiennes, musulmanes ou druzes s’entre-déchirent. Connues, exposées déjà dans plusieurs foires, les photographies de cette série résonnent tout particulièrement dans les ruines grandioses de l’abbaye de Jumièges, joyau architectural dépecé au cours des trois décennies qui suivirent la Révolution. Conçue par Gabriel Bauret dans le logis abbatial, l’exposition incite à voir, à revoir et à saisir le cheminement puis le parti pris photographique de Gabriele Basilico, bien différent de ceux de René Burri, Raymond Depardon, Fouad Elkoury, Josef Koudelka et de Robert Frank, eux aussi invités au même moment à Beyrouth par la Fondation Hariri. Articulé entre planches contacts, photographies, publications et film inédit sur Basilico à Beyrouth, le propos côtoie sans les parasiter les chefs-d’œuvre de l’abbaye (statues, tombes, retables, chapiteaux sculptés) exposés dans l’abbatiale. Au contraire, ils dialoguent et ramènent à d’autres destructions irréversibles du patrimoine commises actuellement au Moyen-Orient, tandis que la salle consacrée aux photographies réalisées dans le cadre de la commande de la Datar sur le littoral de la Manche donne une nouvelle fois la mesure du talent de Gabriele Basilico à saisir ce que disent les paysages urbains des sociétés qui les ont bâtis.