Thomas Lévy-Lasne, réalité augmentée

Filles qui dansent, sol couvert de confettis, mégots flottant dans un lavabo. Corps tronqués, visages absents, angles de vue éthyliques (trop bas, trop penchés). Ces fêtes, l’artiste commence d’abord par les vivre, armé d’un appareil photo, avant d’en travailler la composition sur ordinateur pour la retranscrire ensuite sur papier. L’image est fabriquée, copiés-collés de clichés choisis. Pas d’obsession du vrai, cette chimère. Si Thomas passe des heures à travailler sur une œuvre, c’est plutôt par « amour » d’une réalité, d’un ordinaire dont il tend à intensifier la perception. Non sublimer, mais densifier la présence. La jouissance viendra d’un détail, string qu’on devine en transparence, froissé d’un pantalon. Pour assouvir son désir de peinture (à l’huile toujours), tout est bon à prendre : piocher dans l’histoire de l’art – Poussin ou Courbet hantent ses paysages, Hopper ses scènes de couples –, faire le portrait d’un ami, d’une vache, d’un garçon coiffeur (à l’occasion d’une commande pour l’adaptation à l’écran de La Carte et le Territoire de Houellebecq). Le sujet n’a que peu d’importance, ou plutôt tous en ont ! Résultat, on se prend de fascination pour la coupe d’un pull bientôt démodée, happé par l’image où le temps semble s’être étrangement accumulé. Un peu voyeur, un peu Narcisse. Résolument heureux.