L’Art dans le monde de 1960 à nos jours de Philippe Dagen (éd. Hazan, 255 p., 35 euros) est moins une encyclopédie exhaustive qu’une amorce d’essai.
Si la première partie peine à passionner le lecteur en plus d’être parfois trop prompte dans les démonstrations et trop encline aux énumérations , l’historien de l’art jette quelques pavés dans la mare, comme celui-ci qui laisse présager le meilleur : « Certains [musées] font la mode, au point d’être soupçonnés d’intervenir indûment dans le champ du marché, qu’ils ne peuvent manquer d’influencer. » La deuxième partie, qui aborde les années 1960-1980, nourrit davantage le lecteur en le laissant tout de même sur sa faim. Ainsi, est-ce aller trop vite que d’écrire, sans pour autant que ce soit une contrevérité : « Que Flavin célèbre le constructiviste russe (Vladimir Tatline) inscrit son œuvre – et le minimalisme par conséquent – dans la continuité du mouvement abstrait. » On s’attend évidemment à plus de développement lorsque l’auteur choisit d’évoquer une telle problématique pour retracer l’histoire des avant-gardes. Tout au long de cette deuxième partie, Philippe Dagen, qui traite de pratiques qui sont rarement mis en lumière, comme le happening, tient à conserver son regard critique : « On pourrait soutenir que performance et médiatisation sont indissociables : la performance est un mode d’action adapté […] à la “société du spectacle” […] dès les premiers happenings new-yorkais et les plus anciennes viennoises, une attention constante est portée à la qualité de la photographie et du film, à la présence d’appareils et de spécialistes des images. » La troisième et dernière partie est, elle, par endroits jubilatoire. Enfin, quelqu’un qui ose ! « Il serait surprenant que ces conditions (le développement du marché par les galeries, les foires et les ventes aux enchères et la prolifération des musées) n’affectent que la diffusion de la création et non le processus créateur. » Et ailleurs : « La question des rapports aux pouvoirs économiques et politiques devient centrale, comme au temps des mécénats pontificaux et royaux, quand l’œuvre faisait l’éloge du prince ou du pontife. Provocation, malaise ou dénonciation ne sont plus à l’ordre du jour. Des notions telles que spectacle, consensus, décor et exploit technique s’imposent à leur place. » Et enfin ceci : « Il peut aussi paraître déconcertant que ces articles burlesques ou scabreux [en parlant d’œuvres] séduisent des collectionneurs tels François Pinault, Charles Saatchi ou Dakis Joannou. Jusqu’alors dans l’histoire du goût, les préférences des mécènes et grands amateurs allaient à des œuvres sacrées et non sacrilèges, majestueuses et non parodiques » ! Patrice Chéreau informé de critiques tout juste formulées à son égard s’était, en guise de réponse, frotté les mains. Souhaitons que Philippe Dagen en fasse de même.
Philippe Dagen, L’Art dans le monde de 1960 à nos jours, éd. Hazan, 255 p., 35 euros.
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Philippe Dagen, L'Art dans le monde de 1960 à nos jours
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°660 du 1 septembre 2013, avec le titre suivant : Philippe Dagen, L'Art dans le monde de 1960 à nos jours