La tête dans les Nuages

Entre anamorphoses et métamorphoses, ils invitent les artistes à revisiter leur magie. Mais ici pas de cieux à la Boudin ou selon Constable. En « mettant le nuage à portée de main », cette exposition originale invite à poursuivre la course à laquelle cinquante-sept artistes donnent une seconde dimension, au moyen de métaphores, d’échos, d’empreintes, de connivences.
Avec un délicat plâtre intitulé Entre feuille et oiseau, Jean Arp « sert de boussole ». Comme les vents s’orientant à partir de la rose, chacun à son tour traduit de multiples manières la beauté de ces corps célestes, ajoutant aux matériaux les plus inattendus ce qui permet de la capter et d’en accroître le sens : la poésie. Ainsi de Brassaï, qui fait rimer courbes anatomiques et hautes turbulences, de Spilliaert, qui au bout d’une volute noire suggère un profil féminin, d’Anselm Kiefer, qui fige dans un livre en plomb l’arc-en-ciel des nues ou encore de Man Ray, qui au-dessus de trois pêches place des boules de coton semblables à des cumulus blancs.
Parce qu’inatteignable, le nuage est un sujet inépuisable. On en attrape l’essence par le charme, pour reprendre la fable de Jean Arp. Comme l’avait fait en 1960 Andy Warhol, des Silver Clouds gonflés à l’hélium flottent dans une salle ; le visiteur les lance et relance à son gré. Non loin, une grande photo colorée de Robert et Shana ParkeHarrison montre un nettoyeur de nuage qui porte une échelle dérisoire sur le dos ! Grâce au principe de contiguïté et non de continuité qui a été choisi, on mesure l’impalpable devant Nuage IV, à la fois structure d’acier et sculpture enserrant le vide qui épelle autant de lettres et de signes qu’il y a de choix offerts à l’imagination dans ce parcours léger et sérieux.