Un maniérisme propre au Nord

Perceptible chez les peintres anversois et romanistes, dans les scènes de genre et les paysages, il se dévoile dans son ensemble au Musée de Flandre à travers près de quatre-vingt-dix œuvres, issues de collections privées rarement montrées. Pour la commissaire et directrice de l’institution, Sandrine Vézilier-Dussart, il ne s’agit pas d’un « maniérisme flamand », mais plutôt « d’une expérience qui traversa la pratique de nombreux peintres de la région ». L’exposition embrasse d’un regard le déploiement surprenant et changeant de ce courant qui toucha chaque genre et chaque atelier au cours du siècle.
Bien avant 1520, date des prémices du maniérisme italien, ses caractéristiques apparaissent en Flandre dès la fin du XVe siècle chez les peintres primitifs, comme le montre la première partie du parcours. Le maniérisme de Flandre n’est pas en rupture avec le mouvement précédent comme l’est le mouvement italien vis-à-vis de la Renaissance. Certes proches de leur parent du Sud par leur vocabulaire (poses exagérées, couleurs acides et goût de l’exotisme), les compositions conservent, dans la lignée des primitifs, le réalisme des scènes de genre comme celles de marché de Pieter Aertsen (1508-1575) et la codification des représentations où chaque objet exprime une idée, appelle une histoire. Ce maniérisme, par sa bizarrerie et son exagération, vient notamment s’inscrire dans l’exploration du fantastique à la suite de Brueghel l’Ancien et avant Pieter Van den Bosch comme un moyen d’en extraire les expressions les plus inventives.