Quoiqu’elle se présente comme une « foire internationale d’art contemporain », il ne faudrait pas croire que la Fiac soit amnésique et qu’elle ait oublié que l’histoire se nourrit de sa propre mémoire.
Contemporaine et prospective, elle l’est assurément, mais elle n’en est pas moins attentive à une formulation moderne de l’art tel qu’il a notamment animé le XXe siècle. Un certain nombre de galeries qui y participent opèrent ainsi en phares d’une création que le temps qualifie de moderne, mais qui conserve en elle sa part de contemporanéité.
Doyenne entre toutes, la Galerie Jeanne-Bucher, qui a été fondée en 1925 mais qui s’est dotée depuis 2008 d’un nouvel espace consacré à l’art contemporain, est l’une des enseignes les plus offensives en art moderne. Représentante des successions d’Aguayo, de Roger Bissière, de Nicolas de Staël, d’Arpad Szenes et de Vieira da Silva, elle contribue à qualifier la programmation de nombreuses expositions muséales tout en offrant aux collectionneurs privés la possibilité d’accéder à des pièces majeures. Animée par son président Jean-François Jaeger, la direction générale en revient à sa fille Véronique, qui a été pendant de longues années la commissaire générale de la Fiac.
Des petits musées au sein de la Fiac
Côté photographie, Alain et Françoise Paviot ont porté l’invention de Nicéphore Niépce au plus haut d’une qualité et d’une reconnaissance. Voilà trente-cinq ans que celui-ci a créé la galerie, la consacrant à une production historique et moderne, et voilà dix-sept ans que celle-ci l’a rejoint pour l’ouvrir sur le contemporain. La liste des artistes qu’ils représentent est considérable : Gustave Le Gray, Charles Nègre, Eugène Atget, Man Ray, Cartier-Bresson, Doisneau, Anna et Bernhard Blume, etc. La passion chevillée au corps, les Paviot passent plus de temps à expliquer leur choix et à faire partager leur enthousiasme qu’à gagner une vente.
Une même passion dévorante anime Marcel Fleiss, directeur de la galerie 1900-2000 créée il y a une trentaine d’années. Passé expert en Dada, surréalisme, pop art, hyperréalisme américain et jazz, c’est un intrépide chasseur de raretés. À l’affût de tout ce qui fait trace, il adore qu’on lui demande de rechercher des perles et il réussit le plus souvent à les trouver ! Doué d’une mémoire d’éléphant, il n’a pas son pareil pour organiser des expositions aux allures de cavernes d’Ali Baba qui fourmillent de trésors : peintures, photographies, dessins, documents, etc. S’il affectionne tout ce qui est petit et modeste, cela n’empêche qu’il y a sur ses murs de purs chefs-d’œuvre.
Installée dans les locaux mêmes de la célèbre librairie Le Minotaure – haut lieu intellectuel du Paris des années 1950-1980 animé par Roger Cornaille –, la galerie du même nom lui a succédé en 2002. Créée par Benoît Sapiro, elle est le rendez-vous des amateurs éclairés des avant-gardes du début du XXe siècle, versant Russie et Europe centrale pour l’essentiel. De Arp à Tutundjian en passant par Beothy, Exter, Klucis, Larionov, Pougny et Stepanova parmi tant d’autres, Benoît Sapiro s’applique à faire redécouvrir toute une population d’artistes trop souvent laissés-pour-compte alors même qu’ils ont été les acteurs d’une des périodes les plus fécondes et les plus inventives. Chacune de ses prestations est digne d’un musée.
- Galerie Jeanne-Bucher, Paris-6e, www.jeanne-bucher.com
- Galerie Françoise Paviot, Paris-2e, www.paviotfoto.com
- Galerie 1900-2000, Paris-6e, www.galerie1900-2000.com
- Galerie Le Minotaure, Paris-6e, www.galerie-leminotaure.com
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Ils font la Fiac des historiques
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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°651 du 1 novembre 2012, avec le titre suivant : Ils font la Fiac des historiques