Le Musée de Montbéliard veut faire redécouvrir Albert André (1869-1954), estimé en son temps, oublié depuis.
MONTBÉLIARD - Pourquoi un artiste tombe-t-il dans l’oubli ? En filigrane de l’exposition consacrée au peintre Albert André (1869-1954), cette question revient de façon récurrente. Indéniablement, l’homme a du talent, une touche personnelle, un regard singulier. Présenté au Salon des indépendants de 1895, son panneau décoratif La Femme en bleu impressionne Auguste Renoir, lequel convainc Paul Durand-Ruel d’intégrer le peintre dans sa galerie parisienne. Une indéfectible amitié naît alors entre les deux artistes, et une fidélité sans faille se noue avec le marchand, qui le suivra durant sa très longue carrière.
Vision proche de celle d’Hopper
Près de 3 500 peintures et dessins, plus de 200 expositions en France et à l’étranger et une œuvre méconnue, soixante ans après sa mort. Si le Musée du château des ducs de Wurtemberg à Montbéliard (Doubs) s’intéresse aujourd’hui à lui, c’est au détour d’un raccrochage des collection. La directrice des musées, Aurélie Voltz, se penche alors sur Jacqueline lisant, corsage rayé rouge (1935), issue de la donation effectuée en 1969 par Jacqueline Bret-André, composée d’un ensemble de cinquante œuvres du peintre. « Si l’œuvre d’Albert André n’est pas égale, il y a dans ses toiles, ses variations autour de l’intime, un silence diffus, une vision proche de celle d’[Edward] Hopper », commente la commissaire de l’exposition.
En 1889, Albert André entre à l’Académie Julian à Paris. Il partage l’atelier de Louis Valtat, fraternise avec Édouard Vuillard, Pierre Bonnard, se fond dans le courant des Nabis dont il gardera les accents décoratifs tout au long de sa carrière. Dès ses débuts, ses œuvres intéressent les peintres de la génération précédente : Pissarro tente de lui acheter des toiles, elles sont déjà vendues tant elles rencontrent du succès à la galerie Durand-Ruel. Les Américains en raffolent : on estime que la moitié de son œuvre se trouve aujourd’hui aux États-Unis. Pour le reste, l’historiographie doit s’attacher à la personnalité de Jacqueline Bret-André née Brétégnier, modèle, amante puis fille adoptive du peintre, devenue la légataire de son œuvre, directrice du Musée Albert-André de Bagnols-sur-Sèze, où elle œuvra jusqu’à sa mort en 2006 à la sauvegarde des toiles d’Albert André dans les collections des Musées du Gard. Paradoxalement, le travail de préservation presque sacerdotal de Jacqueline, dont la figure emplit les toiles du peintre, aura étouffé la cote de l’artiste, le marché de l’art ignorant tout de lui.
Reste aux historiens à se pencher sur l’œuvre délicate et colorée d’Albert André, résistant jusqu’à sa mort aux sirènes de l’abstraction, suivant en cela les préceptes de ses amis Elie Faure et George Besson. À Montbéliard, sa peinture rejaillit.
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Albert André, en toute intimité
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 27 septembre, Musée du château des ducs de Wurtemberg, 25200 Montbéliard, tél. 03 81 99 22 61, tlj sauf mardi, 10h-12h, 14h-18h, entrée 5 €. Catalogue, 64 p., 10 €.
Légende photo
Albert André, Torse de femme nue, 1935, huile sur toile, 54,8 x 46,2 cm, collection Musées de Montbéliard, dépôt du Musée d’Orsay. © Photo : Pierre Guenat.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°439 du 3 juillet 2015, avec le titre suivant : André, en toute intimité