Peinture ancienne

Paris à la traîne en 2014

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 14 janvier 2015 - 809 mots

Si le marché de la peinture ancienne à Londres et New York se porte bien, à Paris, les tableaux anciens importants se font de plus en plus rares.

D’après les chiffres de Sotheby’s et Christie’s à Londres et New York, l’année 2014 s’agissant des ventes de tableaux anciens est en progression de 20 % par rapport à l’année 2013, passant de 275 à 331 millions d’euros (1) pour les ventes de prestige. Mais, si l’on se concentre sur les seuls chiffres des maisons formant le trio de tête en France, le résultat est en baisse : 24,8 millions d’euros contre 28 en 2013. Artcurial passe de 10,5 millions à 7, Christie’s de 12,9 à 5,2 et Sotheby’s, la seule à progresser, totalise 12,6 contre 4,6 l’an passé.

Peu de tableaux de grande qualité sont apparus sur le marché français en 2014, les pièces rares étant captées par les places de Londres et New York, où les plus belles œuvres ont été vendues. « La raréfaction des pièces, le fait que les collectionneurs ne soient pas vendeurs, la force de frappe des maisons de ventes anglo-saxonnes, leur marketing, tout cela explique pourquoi les pièces phares se vendent surtout chez Sotheby’s et Christie’s », commente Nicolas Joly, expert. « On ne trouve plus de tableaux. Les acheteurs sont majoritairement anglo-saxons. Ils sont davantage présents à Londres et New York qu’à Paris. Et puis les relations avec les vendeurs sont compliquées », ajoute Mathieu Fournier, directeur du département tableaux anciens chez Artcurial.

Cette année, en France, c’est Drouot qui remporte la palme pour la catégorie avec Figure d’homme au manteau de fourrure, de Giambattista Tiepolo (1696-1770), rare sur le marché, toile adjugée 3,7 millions d’euros (estimation 800 000 euros à 1,2 million d’euros) chez Pierre Bergé le 17 décembre. La deuxième place revient à Pieter Brueghel le Jeune et sa Danse de noces en plein air, adjugée 1,6 million d’euros en mars chez Artcurial. Quant à la troisième plus haute enchère, c’est à l’Hôtel des ventes d’Enghien-les-Bains (Val-d’Oise) qu’on la doit, où un Portrait d’homme âgé de 56 ans, de Frans Pourbus le Jeune (1569-1622), a été acquis 935 860 euros (est. 150 000 à 200 000 euros) le 23 novembre. Sotheby’s France, pourtant leader en 2014, n’arrive qu’en quatrième position avec la Marie Madeleine d’Artemisia Gentileschi (1593-1652), adjugée en juin 865 500 euros (est. 200 000 à 300 000 euros), un record mondial pour l’artiste.

Échanges Londres-New York
Mais les plus beaux records ont été enregistrés à Londres et New York. C’est d’ailleurs dans la capitale anglaise que le prix le plus haut de l’année dans la spécialité a été atteint : Rome, vue de l’Aventin (1836), de Turner, a été adjugée 37,6 millions d’euros (est. 18,7 à 25 millions d’euros) le 3 décembre. Si aucune des deux villes ne prime sur l’autre, les départements de peinture ancienne de Christie’s comme de Sotheby’s collaborent d’un pays à l’autre pour céder l’œuvre au haut prix. Ainsi, le tableau de Turner n’aurait pu être mieux vendu ailleurs qu’à Londres. De manière générale, « à New York, les grands formats, spectaculaires, très décoratifs, les sujets accessibles sont très prisés. À Londres, la peinture religieuse ou d’un abord plus complexe se vend plus facilement », souligne Nicolas Joly.

Prime aux signatures
Des disparités sont à noter concernant les différentes écoles. En effet, l’école italienne souffre un peu, les Italiens ayant réduit leurs achats depuis deux ans. Les natures mortes et les paysages sont moins à la mode qu’il y a quelques années. Vedute et grandes vues se vendent plus difficilement si l’œuvre n’est pas signée d’un grand nom comme Canaletto ou Guardi. Le Bassin de Saint-Marc avec la place et le palais des Doges, de Guardi, a été adjugé 12,5 millions d’euros (est. 10 à 12 millions) chez Christie’s Londres en juillet (deuxième prix le plus élevé). En revanche, les œuvres caravagesques ont le vent en poupe, et les fonds d’or continuent de plaire. La peinture hollandaise et flamande, elle, séduit toujours et les marchands spécialisés dans ce domaine soutiennent leur marché, restant très actifs. Quant à la peinture française, si celle du XVIIIe siècle n’est pas de la main de Watteau, Fragonard ou Boucher, elle a tendance à être délaissée, tandis que l’on constate une pénurie pour le XVIIe siècle, peu de tableaux passant aux enchères.

En 2014, une tendance se confirme : les prix sont de plus en plus forts pour le haut du panier. Ceci s’explique en partie par le fait que les maisons de ventes anglo-saxonnes partent à la chasse aux amateurs d’autres catégories, notamment celles de l’art contemporain et de l’art impressionniste et moderne. Ces acheteurs ne connaissent pas de limite quand ils estiment qu’une œuvre possède un gros potentiel.

Note

(1) Tous les résultats sont indiqués frais compris (entre 12% et 25 %) tandis que les estimations sont indiquées hors frais acheteur.

Bilan - Les ventes publiques en 2014

  • Nouvelle poussée des ventes publiques ></a></li>
    <li>Une année de contrastes <a href=></a></li>
    <li>Un marché toujours solide <a href=></a></li>
    <li>Bilan flatteur <a href=></a></li>
    <li>Toujours plus haut <a href=></a></li>
</ul>
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°427 du 16 janvier 2015, avec le titre suivant : Paris à la traîne en 2014

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