Jean-François Jarrige, spécialiste des civilisations de l’Indus, est l’artisan de la renaissance du musée.
PARIS - Avec la disparition Jean-François Jarrige, survenue le 18 novembre au terme d’une longue maladie, les arts asiatiques perdent un personnage emblématique, un intime connaisseur et un ardent défenseur. Les équipes du Musée national des arts-asiatiques Guimet à Paris se retrouvent, elles aussi, orphelines d’un dirigeant charismatique qui, de 1986 à 2008, a redonné à l’institution le lustre qu’elle méritait.
Né à Lourdes en 1940, le jeune passionné a très vite fait de l’Asie sa vocation. Formé à l’École du Louvre option « Inde et Chine », il se spécialise en archéologie en intégrant le CNRS, où il deviendra directeur de recherches. Le Baloutchistan pakistanais occupera ses pensées dès 1964, la première d’une trentaine d’années de fouilles et de recherches dont le point culminant fut, en 1975, la découverte du site de Mehrgarh. Cet homme de terrain, qui s’est toujours considéré comme un chercheur spécialiste des civilisations de l’Indus, qualifiait ses années à la tête du Musée Guimet de « parenthèse » ; une parenthèse enchantée pour l’institution, longtemps victime de l’indifférence de la Direction des musées de France. La reconstitution du Panthéon bouddhique japonais relégué dans les réserves est la première étape d’un vaste de plan de transformation du lieu.
Érudit et novateur
Visionnaire, Jean-François Jarrige mène tambour battant la campagne de réaménagement du musée fondé par Émile Guimet devenu un lieu si vétuste que la sécurité des œuvres était menacée. En 2001, le palais de la place d’Iéna renaît sous la forme d’un musée élégant et moderne, dont les collections exceptionnelles bénéficient d’une muséographie repensée et surtout d’un programme d’enrichissement ambitieux. Pour financer ce projet de « Louvre d’Asie », Jean-François Jarrige obtient le soutien de grands entrepreneurs d’Extrême-Orient, se révélant fin diplomate sachant composer avec la sensibilité de ses interlocuteurs asiatiques. Très tôt conscient du rôle essentiel du mécénat pour favoriser le rayonnement du musée, Jean-François Jarrige est aussi parmi les premiers à s’être rapproché des antiquaires et des marchands : « S’il n’y a pas un commerce de l’art dynamique, il n’y a pas de collectionneurs, donc pas de donateurs », disait-il (JdA n° 208, 4 février 2005).
Esprit vif et brillant, dont les élèves de l’École du Louvre et l’Université de Lucknow (Inde) ont eu la chance de profiter, Jean-François Jarrige a présidé l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, siégeait à des nombreuses commissions de recherches archéologiques, et croulait sous les honneurs officiels. Commandeur de la Légion d’honneur, de l’Ordre national du Mérite, des Palmes académiques et de l’Ordre des Arts et Lettres, il arborait également l’Étoile du Pakistan.
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Le Musée Guimet orphelin
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°424 du 28 novembre 2014, avec le titre suivant : Le Musée Guimet orphelin